Après avoir écrit « Pèlerin d’Orient, à pied jusqu’à Jérusalem », vous venez de publier, toujours aux éditions Transboréal, « Pèlerin d’Occident, à pied jusque Rome ». Quel type de pèlerin êtes-vous ?
Un marcheur qui s’est engagé à deux reprises sur des chemins de plusieurs milliers de kilomètres vers des villes marquées par la foi : Jérusalem et Rome. Cela dit, je ne suis pas parti avec des grandes idées mystiques, je ne suis pas parti à Jérusalem dans un but religieux, mais pour répondre très concrètement, par un moyen pragmatique, à des soucis personnels qui s’accumulaient un peu trop fort à mon goût. Peut-être un peu la tête au ciel, mais clairement les pieds dans la boue ! Et si je suis parti seul, c’est que j’avais probablement trop de choses à régler avec moi-même pour marcher à plusieurs. Et puis, sur un trajet aussi long et aussi exigeant, les participants ne se recrutent pas au coup de sifflet. Pour Rome, sept ans plus tard, les raisons de partir étaient beaucoup plus composites : au-delà des rencontres, de la richesse de l’expérience passée que j’avais hâte de retrouver, il y avait aussi un aspect « voyage en Italie » et découverte des merveilles naturelles et artistiques qui ont ébloui les voyageurs depuis des siècles.
Comment avez-vous préparé votre voyage ?
Physiquement, je n’ai pas préparé grand-chose ; de toute façon, la marche est une activité naturelle. Même si j’ai quitté assez brutalement une mode de vie de sédentaire pour plusieurs dizaines de kilomètres quotidiens. J’ai essayé de prendre un peu de poids avant car je savais que j’allais maigrir, mais il n’y a rien faire : ces kilos artificiels se perdent très vite… et d’autres suivent : quoique je me sois efforcé de manger beaucoup (et plus qu’à ma faim) pour compenser mes dépenses physiques, je n’ai pu échapper à la perte de poids. Environ 10 kilos de moins en 3 mois. Puis, au bout de ces 3 mois, le corps a compris qu’il faut garder et non plus éliminer les calories ; à partir de ce moment-là, j’ai pu revenir à une alimentation normale en maintenant le poids et la forme que j’avais alors.
Sur les photos, on vous voit avec des sandales au pied. Avez-vous réellement fait tout l’itinéraire en sandalettes, y compris dans les Alpes ?
Oui : j’ai couvert tout le parcours avec des sandales, y compris dans les Alpes. En tout, quatre paires m’ont été nécessaires. J’ai été définitivement convaincu par l’usage des sandales, y compris en montagne. Hors des périodes de pluie, le confort d’avoir les pieds à l’air est incomparable. Elles me servaient presque d’altimètre tant ma plante de pieds s’est habituée à reconnaître, vers 1 800 mètres, le souffle glacial et desséchant qui dévale des sommets et s’insinue entre la semelle et la peau, emportant dans son filet toute trace d’humidité. Quand je devais traverser des portions enneigées, je m’efforçais de placer chaque pas dans une des marques de mes prédécesseurs : elles étaient toujours plus larges que les miennes, profondes, bien tassées, solidement crantées. Et si, d’aventure, il m’arrivait de patauger dans un névé… eh bien, après tout, on n’en meurt pas et les pieds ne gèlent pas pour autant. Sans cesse agités par le mouvement de la marche, ils ont rarement froid, même quand la température m’obligeait à protéger mes mains. Quant au risque de me tordre une cheville, il est faible à condition de savoir marcher. L’usage des sandales apprend d’ailleurs à le faire plus adroitement. Comme lorsque l’on monte un cheval à cru ou sans étrier, rien de tel pour acquérir un meilleur sens de l’équilibre que d’affranchir ses chevilles d’un carcan qui ne favorise que la paresse des muscles et des articulations. Au lieu de confier à la tige de la chaussure le soin de rectifier des positions hasardeuses, on apprend à poser les pieds de manière juste, à identifier spontanément et à chaque enjambée les appuis qui ne cèderont pas et sur lesquels on ne dérapera pas, même dans les pentes raides, sur les dévers et dans les éboulis. Cela dit, les éboulis sont désagréables à franchir et, quand je m’égarais dans les moraines et au milieu des blocs instables, des pierres charriées au hasard par les cascades de glace de l’hiver et les torrents de printemps, entassées, brisées, traîtresses, je n’en menais pas large.
Comment définiriez-vous l’Italie que vous avez rencontrée ?
Avant mon départ, l’Italie ressemblait pour moi à un rêve qui court du pont du Garigliano aux sérénades napolitaines, du château Saint-Ange où se joue le drame de la Tosca de Puccini à Fiesole où se sont retranchés les conteurs du Décaméron de Boccace pour fuir la peste de Florence, des flancs du Vésuve où s’est réfugié Spartacus à la douce lumière de Toscane, des ruines de Pompéi aux amours romantiques de la Graziella de Lamartine. Rome, Naples et Florence, avait résumé Stendhal. Un pays qui n’est pas une nation et que l’on conquiert avec le panache de Bonaparte au pont d’Arcole. Et puis Rome, le Siège de Pierre, tête de l’Église. Rome où je n’étais jamais allé.
En traversant l’Italie des Alpes jusqu’aux Pouilles, j’ai goûté les merveilles artistiques qui y surabondent, le ciel limpide d’Ombrie ou la sauvagerie de régions reculées de la Basilicate. J’ai vu d’innombrables villages pittoresques, des maisons qui trouveraient leur place dans une crèche traditionnelle, cette Italie des cartes postales que beaucoup de touristes vont chercher, mais pas seulement : car pour l’atteindre, il faut traverser le « pays réel ». Or, personne ne veut voir les immeubles moches, les maisons quelconques, les supermarchés et les ronds-points. Moi, j’étais bien obligé parce qu’à pied, c’est tout bête, il faut du temps pour traverser la modernité.
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Quel est le moment qui vous a le plus ému ?
Peut-être le moment qui risquait le plus de me décevoir : celui de l’arrivée à Rome, sur la place Saint-Pierre. Après cinq mois et demi de marche ; 4 000 kilomètres, peut-être 4 500 : cela n’avait pas beaucoup d’importance. Elle fut étrange, cette arrivée, car j’eus l’impression d’une grande libération. Les doutes qui m’avaient longtemps assailli sur la pertinence du voyage disparurent comme par enchantement. Dans les jours qui précédaient, je me disais que je serais content d’arriver et, à ma grande surprise, je fus beaucoup plus que content, comme si toutes les difficultés et toutes les interrogations avaient été balayées pour laisser la place à une allégresse pure et profonde.
Partir, revenir puis repartir. Comment gère-t-on cette vie morcelée. N’est-ce pas trop schizophrénique ?
Le retour à une vie plus habituelle, évidemment, c’est difficile. Tellement qu’il faut des années avant d’oser repartir. Le temps, probablement, d’oublier à quel point c’était dur de remettre ses pas dans le prolongement de « la vie d’avant ». Certains ne repartent jamais. Quant à ceux qui bouclent leur sac au bout de quelques mois pour une nouvelle aventure, ils ne sont sans doute jamais sortis de la précédente. Au retour de Jérusalem, j’ai essayé de conserver dans mon existence redevenue semblable à celle des autres cette sorte de sérénité qui s’était établie presque à mon insu. Au fil des années, cette sérénité s’était peu à peu étiolée, et de là naquit le désir de repartir. Un nouveau départ, un nouveau retour : oui, c’est très violent ; et l’on n’en ressort pas indemne, même si les facultés d’adaptation de l’être humain sont étonnantes !
Êtes-vous tenté pour vivre un nouveau long voyage ? Et vers quel(s) lieu(x) iraient vos envies ?
Entre mes deux voyages au long cours, sept ans se sont écoulés. Le périple italien date de moins de deux ans, et il me reste encore plusieurs années de réflexion, n’est-ce pas ? Et puis, partir une fois tous les sept ans, ce n’est pas excessif…
Début 2009, vous venez de rééditer votre récit entre Paris et Jérusalem. Quels ajouts y avaient vous fait ?
L’annexe historique a été enrichie de plusieurs témoignages supplémentaires de voyageurs vers Jérusalem. En revanche, le récit est demeuré inchangé, et j’ai préféré nourrir le récit du voyage à Rome de l’expérience du retour de Jérusalem. Quoique ces deux périples, de loin, se ressemblent (plusieurs milliers de kilomètres à pied vers une ville symbolique), je suis parti à chaque fois pour des raisons très différentes et j’ai vécu le voyage aussi de manière très différente. Au lieu de réécrire le premier périple avec le recul de sept ans, j’ai préféré le laisser tel quel et traduire dans « Pèlerin d’Occident » cette différence que j’ai vécue au fil des mois de marche sur les chemins du monde.
- Pèlerin d’Orient (À pied jusqu’à Jérusalem)
- Pèlerin d’Occident (À pied jusqu’à Rome)
- Aux sept coins du monde (Promenade photographique et littéraire autour de la terre)
- Mongolie – les cavaliers de la steppe (Chronique d’un voyage en Mongolie)
Site internet de François-Xavier de Villemagne : www.villemagne.net
Fondateur d’I-Trekkings et des blogs I-Voyages et My Wildlife, j’apprécie le rythme lent de la marche et des activités outdoor non motorisés pour découvrir des territoires montagneux et désertiques, observer la faune sauvage et rencontrer les populations locales. Je marche aussi bien seul, qu’entre amis ou avec des agences françaises ou locales. J’accompagne également des voyages photo animaliers qui associent le plaisir d’être dans la nature et l’apprentissage ou le perfectionnement de la photographie animalière.