Qu’est ce qui t’a amené à devenir gardienne du refuge des Conscrits ?
J’étais déjà gardienne de refuge il y a 20 ans dans l’Oisans. J’ai arrêté cette activité quand j’ai eu des enfants. Après avoir travaillé dans le milieu de la montagne, au bureau des guides des Contamines et quand mes enfants ont été plus grands, j’ai postulé pour plusieurs refuges dont celui des Conscrits. A ma première candidature, ma demande n’avait pas été retenue. La seconde était la bonne. Ça fait maintenant 7 ans que je suis la gardienne du refuge. C’était un vieux rêve d’être ici.
Pourquoi ?
C’est un métier que j’aime et que j’ai la chance de pratiquer dans ma vallée puisque j’habite les Contamines. Et même si on est dans le massif du Mont-Blanc, le secteur du refuge des Conscrits reste sauvage. Ça ressemble un peu à l’Oisans que j’ai bien aimé à l’époque. Le refuge des Conscrits est aussi un refuge qui se « mérite ». Il faut marcher longtemps sur un sentier alpin ; on n’arrive pas ici par hasard et du coup ça permet d’avoir une superbe clientèle.
Tu la définirais comment ?
Ce sont des gens qui ont fourni un effort pour venir jusqu’au refuge. Du coup, ils ne se posent pas en consommateurs quand ils arrivent ici. La montagne recadre les comportements. Et franchement, c’est un refuge où il y a une très bonne ambiance. Ça vient aussi de sa conception. Il est lumineux, spacieux, tout le monde y est serein. Il y a de belles courses de montagne sans la pression des courses au départ du refuge Promontoire. Les dômes de Miage est une très jolie course mais qui ne présente pas d’enjeux et d’objectifs majeurs.
Le refuge a bien quelques défauts ?
Oui, quelques-uns. Les panneaux photovoltaïques ont tous 20 ans. S’ils étaient de nouvelle génération, ils seraient bien plus performants. Mais le gros souci de ce refuge, dont tout le monde est conscient, c’est la façon dont sont traités les effluents en fosse septique. Au printemps, je fais fondre des m3 et des m3 de neige pour des chasses d’eau. Les wc secs, ça a déjà été testés, ça marche, c’est performant. Mais, on les trouve dans des refuges rénovés récemment.
Sur le toit, il y a un magnifique fondoir à neige, qui serait certainement très efficace s’il n’était pas orienté plein nord. Par ailleurs, comme il est quand même à 4m de haut, quand bien même il serait orienté comme il faut, à moins de recruter Superman comme gardien, jeter la neige là-haut c’est quand même acrobatique.
Et du coup tu passes combien de mois ici ?
J’ouvre au printemps, à peu près du 15 mars au 15 mai, puis de mi-juin à fin septembre-début octobre.
Quand on est gardienne, on dort combien d’heures par nuit ?
Ça dépend comment on se débrouille, et si on veut se la jouer à la dure ou pas ? Ici, j’ai une longue saison donc je suis obligée de m’économiser, sinon je ne tiens pas. Il y a des gardiens qui alternent les levers du personnel. Moi, je préfère me lever tous les matins à 3h00. Je gère les petits-déjeuners et je me recouche à 5h00. Je préfère ce système moins décousu. Toute l’histoire c’est de se rendormir quand on s’est recouché. En règle générale, je me couche entre 23h et minuit. Je pense que c’est la partie la plus difficile du boulot. Il y a forcément de la fatigue et on fait un boulot d’accueil qui nous oblige de rester avenant. On ne peut pas trop se permettre d’être fatigué.
Etre gardienne de refuge, ça demande d’être assez solitaire même si tu accueilles du monde sans arrêt. Ça ne doit pas être évident ?
Oui, après il faut quand même aimer les gens. En tout cas je ne sais pas si il faut aimer la solitude mais au moins il faut être configuré pour supporter la solitude et l’excès inverse. Je pense que ce qui coince dans pas mal de refuges, c’est que dès qu’on a des employés, qu’on travaille en équipe, il faut arriver à s’adapter aux uns et aux autres. Vivre ensemble pendant des semaines n’est pas toujours évident.
Et justement, tu as beaucoup de turn-over au niveau de l’équipe ?
Non, pas beaucoup justement. Il y a Jim, le cuisinier népalais, qui est là depuis 14 ans, et qui vient 3 mois tous les étés. Il parle bien français, enfin on se comprend très bien. C’est le pilier de l’équipe. Pour le reste de l’équipe, au printemps j’ai un aide-gardien qui est toujours le même et puis j’ai des étudiants en été qui viennent depuis plusieurs années et qui connaissent bien le boulot. Le turn-over concerne plutôt les étudiants, qui une fois leurs études terminées, cherchent un métier en lien avec leurs études.
Par rapport à la sécurité en montagne, jusqu’où ça va ?
Alors quand j’ai commencé à travailler ici, j’ai été drôlement surprise par rapport à mon expérience précédente au Promontoire, parce que depuis cette époque les téléphones portables sont arrivés. Dans l’Oisans, la surveillance était quasi constante. Les secours dépendaient des gardiens de refuge. Aujourd’hui, les temps ont bien changé et au refuge des Conscrits, on ne voit pas les cordées progressaient sur le glacier et sur l’arête des Dômes de Miage.
De temps en temps je repère des cordées qui me paraissent limites. Je les repère par rapport aux questions qu’ils me posent : « le chemin pour les Dômes il est facile à trouver ? » ou « c’est indiqué pour aller aux Dômes » ?, etc. Et ils m’arrivent de leur conseiller de faire l’aiguille de la Bérangère plutôt que les Dômes de Miage.
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Les périodes de pointe sont plutôt l’été ?
Non pas forcément. Les week-ends de printemps peuvent être très chargés si les conditions de course sont bonnes. C’est d’autant plus compliqué pour nous que la mise en eau n’est pas faite. Il n’y a pas l’eau courante comme en été. L’eau vient d’une source. En période de pointe, c’est assez tendue car il faut aller chercher la neige sur le toit et la faire fondre sur le feu.
L’été, de mi-juin à mi-août, il y a du monde. Après c’est plus calme.
Combien de clients tu accueilles sur une saison ?
Il y a une moyenne de 5000 passages sur une saison complète printemps + été.
Economiquement, c’est viable un refuge ?
Oui. Quand je fais une bonne saison, mes revenus sont suffisants. Si la saison est moyenne, il me faut trouver un autre travail pour compléter mon revenu. Ici, je travaille 6 mois par an mais 24h sur 24.
Les alpinistes et randonneurs te parlent-ils du nouveau sentier qui mène au refuge ?
Ils sont informés de ce sentier, ils sont curieux d’en comprendre la raison. Je suis contente que les réservations se passent par téléphone pour discuter avec eux de la difficulté du sentier.
J’ai déjà refusé des familles qui pensaient venir avec un porte-bébé. Le nouveau sentier des Conscrits va continuer à demander de la prudence, et de la mise en garde ici et en vallée. L’ancien itinéraire par le glacier dissuadait de lui-même les randonneurs en moyenne montagne. Avec le nouveau sentier, il faudra faire attention, mettre les gens en garde, et puis trouver la bonne mesure et les bons mots pour ne pas non plus les effrayer.
Tu as des attentes au niveau du nouveau sentier ?
Honnêtement, je ne sais pas. Si ça améliorait les choses, j’en serais ravie. Pour moi, le principe de ce nouvel itinéraire est d’améliorer la sécurité. Parce qu’aujourd’hui, le glacier est bien enneigé, il est beau mais il est en piètre état. Il est probable qu’il y ait un gros effondrement dans les prochaines années.
Tu as le temps d’aller faire de la randonnée ou des courses d’alpinisme ?
J’essaye un petit peu et de plus en plus. Si l’équipe gère bien, c’est plus facile. Là, avec Jean-Valéry, on est allé faire la Bérangère, et je suis allée faire les Dômes il y a quelques jours.
Carte d’identité du refuge des Conscrits
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Fondateur d’I-Trekkings et des blogs I-Voyages et My Wildlife, j’apprécie le rythme lent de la marche et des activités outdoor non motorisés pour découvrir des territoires montagneux et désertiques, observer la faune sauvage et rencontrer les populations locales. Je marche aussi bien seul, qu’entre amis ou avec des agences françaises ou locales. J’accompagne également des voyages photo animaliers qui associent le plaisir d’être dans la nature et l’apprentissage ou le perfectionnement de la photographie animalière.