Interview Laurence Fleury, auteur d’Une Saison en refuge

Entre deux reportages, Laurence Fleury devient aide-gardien dans un refuge des Pyrénées. De cette expérience difficile, elle a publié « Une saison en refuge » qu’elle a écrit comme un exutoire. Une histoire qui change le regard sur le métier de gardien de refuge. Rencontre.

Laurence Fleury
Journaliste, photographe et Journaliste Reporter d’Images, Laurence Fleury est spécialisée dans la presse magazine (tourisme, montagne, outdoor et territoire) écrite et TV. Elle réalise, filme et monte des courts ou moyens métrages à la demande, pour des entreprises ou des chaînes sur le web.

Laurence Fleury a mis pendant la saison estivale 2010 sa carrière de journaliste entre parenthèses pour devenir aide-gardien dans un refuge des Pyrénées. Loin d’elle l’idée d’écrire un livre sur son expérience, elle y allait pour travaille et gagner sa vie. Mais ce sont les circonstances là-haut qui l’ont poussée à écrire, pour tenir le coup; comme un exutoire.

Dans son ouvrage, Une saison en refuge, elle revient sur son expérience à la manière d’un carnet de voyage et permet aux lecteurs de vivre le métier de l’intérieur. Pour ne pas froisser les gens évoqués dans le livre, le refuge comme les noms des personnages ont été modifiés.

Qu’est-ce qui te plaisait dans l’idée de devenir aide-gardien dans un refuge ?

J’ai toujours eu envie de m’y essayer, car je fréquentais les refuges depuis de nombreuses années, et je trouvais sympa le fait de rester en montagne toute une saison, loin de la ville. Une manière d’être un peu plus au contact avec la nature et les éléments. C’est ce que je pensais, avant de tenter l’expérience.

Laurence Fleury

Tu as finalement très vite déchanté. Explique nous pourquoi ?

J’ai déchanté parce que je suis mal tombée. Ce n’est pas tant le métier qui m’a déplu, même si je ne m’attendais pas à un rythme aussi effréné. Mais c’est la relation avec la gardienne en chef, essentiellement, qui m’a minée toute la saison. Il n’y avait pas de communication, aucune complicité. On était aux ordres et c’est tout. Je n’avais jamais le temps de discuter avec les clients sympas (car il y en a quand même ! Malgré ce que je raconte dans le livre.) Sur 10 personnes, s’il y a un pénible, c’est de lui qu’on se souvient, et c’est ces gens là dont j’ai parlé dans l’ouvrage.

Le boulot est si dur que ça ?

Oui le boulot est difficile, parce qu’intense. On n’a pas le temps de souffler en haute saison. Les petits déjeuners, le ménage, qui prend des heures, la corvée de chiottes, ce sont des choses très désagréables que je faisais vraiment à contre cœur. Je ne m’épanouissais pas dans tout ça. Et le peu de moments qui auraient pu rattraper ces moment difficiles, l’échange avec les clients sympas, ou une bonne ambiance avec l’équipe de gardiens, n’existait pas. Du coup c’était une contrainte permanente, du matin au soir.

 

Refuge de Camporells dans les Pyrénées

Le récit ne se déroule pas au refuge de Camporells illustré sur la photo mais dans un refuge dont l’anonymat a été gardé ; Laurence Fleury l’appelle le refuge de la Voie Normale.

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Fort de ton expérience, Quelles sont les principales compétences requises pour devenir aide-gardien ?

Il faut être réactif, dynamique et surtout endurant ! Mais je crois que la qualité première pour faire ce métier, c’est aimer les gens. Et la gardienne en chef ne les aimait pas.

Son caractère a fini par déteindre sur moi. Je devenais presque comme elle au final; tous les gens étaient susceptibles d’être pénibles, a priori. Et du coup, on ne peut pas être aimable avec eux.

S’il y avait un message à faire passer aux montagnards, randonneurs, alpinistes et autres usagers des refuges, ça serait lequel ?

Il faudrait qu’ils se rendent compte de la difficulté du métier, debout du matin au soir à faire le ménage, les repas, les servir… Et qu’ils soient un peu plus respectueux des lieux, et du travail que l’on accomplit pour eux. Il y en a pour qui tout est dû parce qu’ils paient. Et bien non, ça ne devrait pas être comme ça. On est en altitude, avec toutes les difficulté que ça représente, le manque d’eau essentiellement. On ne peut pas leur offrir la même prestation qu’en bas dans un gîte de bord de route. Et ils ont tendance à l’oublier facilement.

 

Laurence Fleury au Cervin sur l'arête du Lion

Avec du recul, qu’as-tu appris de cette expérience ?

J’ai surtout appris que je n’étais pas faite pour cela, que j’avais un métier que j’adore et que je ne pouvais pas en changer. Je suis journaliste au plus profond de mes tripes, et changer de profession serait me renier, renoncer à ce que j’aime faire le plus : raconter des histoires, témoigner. Je suis indépendante, pigiste, et c’est parfois difficile d’en vivre. Je n’avais pas de pige au moment où j’ai choisi de faire cette expérience d’aide gardienne. Peut-être que l’idée de changer de métier à ce moment là m’a effleuré l’esprit. Mais je me suis vite rendue compte qu’il est trop important d’aimer ce qu’on fait pour s’épanouir. Même si parfois c’est difficile.

Y a t-il une petite chance que tu redémarres une nouvelle saison d’aide-gardien au refuge de la voie normale ou ailleurs ?

Non absolument pas. Je ne remettrai pas le tablier ! En revanche j’aime faire des reportages en montagne et dans les refuges. J’ai d’autres projets de sujets autour de ça. Et j’espère les mener à bien.

Bibliographie

Site internet : www.laurence-fleury.fr

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