L’Association des Voyageurs et Voyagistes éco-responsables : réponses à ATR

Capture d'écran du site de l'association des voyageurs et voyagistes Eco-responsables
Suite à la mise en ligne d’une actualité sur la certification de l’association Agir pour un tourisme Responsable, Jean-Pierre Lamic, Président de l’Association des Voyageurs et Voyagistes Eco-responsables a souhaité disposer d’un droit de réponse. I-trekkings lui a ouvert ses colonnes…

Je vous invite ensuite à poursuivre le débat sur le Forum.

Agir pour un Tourisme Responsable, label ou certification ?

Ce qu’en pense l’association des Voyageurs et Voyagistes Éco-responsables

Le monde du tourisme responsable est en effervescence, les médias en parlent, certains l’attendaient depuis longtemps, voire le souhaitaient, les protagonistes jubilent et communiquent déjà sur le thème…

Oui, enfin, les premiers lauréats sont désignés, ils l’ont obtenu le label tant convoité, celui de voyagiste responsable…
Les autres, ceux qui travaillent pour ces tour-opérateurs, leurs concurrents, les guides et réceptifs, les voyageurs, s’interrogent : en quoi ce label changera-t-il les pratiques qu’ils voient se développer depuis quelques années : standardisation, sous-traitance, co-production de séjours, développement du sur-mesure et de la randonnée en liberté industriels, éviction des guides et accompagnateurs français, utilisation de réceptifs à taille exponentielle, emploi abusif de stagiaires ?…

Un label est la propriété de l’État, décerné par un organisme indépendant qui vérifie le respect de critères établis par les pouvoirs publics.
Généralement des représentants des consommateurs du secteur concerné participent à leur élaboration.

La certification ne détermine que la reconnaissance par un organisme indépendant de l’application de critères qui peuvent être établis par les structures qui la sollicitent, sans que les pouvoirs publics n’interviennent dans l’élaboration de ces derniers, pas plus que les premiers concernés, les consommateurs…

Les critères ATR ont été établis en deux étapes par cette association qui regroupe une vingtaine de voyagistes et dont les membres fondateurs étaient eux-mêmes des tour-opérateurs considérés en tant que personnes morales.
Ni les pouvoirs publics, ni les voyageurs n’ont été consultés lors de leur détermination.
J’ajouterai en outre, qu’aucun des acteurs de terrain : guides, réceptifs ou employés n’ont été sollicités pour donner leur avis.

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  • La Balaguère (randonnées dans les Pyrénées et à travers le monde)
  • Randonades (Randonnées dans les Pyrénées et rien que les Pyrénées)
  • Travelbase (Agence de voyage pour des aventures à vivre en groupe ou en solo, et avec l’esprit Travelbase)

Dans le cas qui nous intéresse, il ne s’agit donc pas d’un label, même si cette terminologie est souvent employée abusivement par ceux qui en parlent.

Nous sommes donc clairement dans le cas d’une certification ATR, par l’organisme indépendant AFAQ-AFNOR (Association française de normalisation).

La qualité du processus dépend donc entièrement de celle des critères. Leur étude minutieuse révèle :

  • La légitimation des randonnées non-accompagnées (randonnées en liberté), des voyages d’entreprise (incentive) avec un nombre de 25 participants toléré, et même des croisières… Catégories de voyages qu’une personne connaissant leurs implications de terrain aura du mal à considérer comme vertueuses.
  • La non-obligation de n’employer que des réceptifs originaires du pays visité comme le montre le critère suivant : Au moins 60% des voyageurs sont pris en charge par des réceptifs (nationalité ?) dont 75% du personnel sont d’origine régionale. Ce critère ne fait qu’entériner la situation préexistante et n’est de fait absolument pas contraignant. En Amérique latine, par exemple la majorité des prestataires des voyagistes d’aventure sont des Européens expatriés, qui emploient très certainement du personnel local pour une raison de coût et de commodité avant les motivations éthiques.
  • Aucune information concernant la taille des réceptifs, élément concret d’importance majeure, car plus la taille du réceptif augmente et plus le consommateur paie les frais de fonctionnent d’une structure dont il ne peut vérifier l’éthique… En outre, plus le réceptif est gros et moins les guides locaux et familles d’accueil éventuelles profitent des retombées économiques.
  • Pas de mention concernant les moyens mis en œuvre pour la gestion des flux dans les zones sensibles à la surfréquentation, ni de possibilité d’accords entre les différents membres d’ATR pour ne pas exploiter à l’unisson les mêmes espaces déjà répertoriés comme étant saturés (nombreux cas connus, notamment dans le désert).
  • Pas d’engagement concernant l’emploi de guides et accompagnateurs diplômés sur les espaces clairement déterminés comme appartenant au milieu spécifique de la montagne, ce qui est pourtant une obligation légale pour un opérateur français. Obligation largement bafouée par l’ensemble de la profession (voir Trek Mag N° 97, décembre 2007, rubrique courrier des lecteurs).
  • Aucune information relative aux moyens mis en œuvre pour optimiser les échanges interculturels. La notion de respect des cultures demeure un vœu pieu aux contours bien flous.
  • Pas d’engagement concernant la préférence pour des structures d’accueil elles-mêmes labellisées ou conçues de manière responsable et respectueuse de l’environnement, pour l’utilisation de WC écologiques, ou une politique d’économie d’eau dans les zones sensibles à ce problème.
  • Aucune référence à la notion de transparence, indispensable à l’établissement de rapports équitables
  • Le silence absolu en matière d’émissions de CO2, de limitation et de compensation, de l’utilisation de transports alternatifs.
  • Aucun engagement concernant l’emploi abusif de stagiaires, pratique particulièrement développée dans le milieu du tourisme d’aventure.

Ajoutons que la certification concerne parfois plus de 300 voyages d’un même catalogue, et que certains d’entre eux jouxtent d’autres activités beaucoup moins responsables que le tourisme d’aventure au sein de groupes de taille internationale.

Pour l’ensemble de ces raisons, l’association des Voyageurs et Voyagistes Éco-responsables ne peut cautionner la certification ATR.

En outre, nous défendons la mise en conformité de chaque voyage (non pas d’une gamme dans son ensemble) avec les objectifs déterminés par pays ou territoire.
Le tourisme est constitué d’une chaîne véritablement complexe de maillons, ce qui rend en outre très improbable la possibilité d’un label prenant en compte l’intégralité de ces derniers.
Sans compter que des actions réussies dans un contexte donné peuvent tout à fait échouer ailleurs…

Pour que le voyageur puisse rapidement se faire une opinion sur les réels enjeux d’un tourisme responsable, notre propre charte devrait être prochainement en ligne sur le blog :
http://blog.voyages-eco-responsables.org/

L’ensemble de la problématique est par ailleurs traitée dans un ouvrage à paraître chez L’Harmattan dont vous trouverez les coordonnées ci-dessous.

Jean-Pierre Lamic, Président de l’association des Voyageurs et voyagistes Éco-responsables,
Auteur de "Tourisme durable : utopie ou réalité ?" Collection Tourismes et sociétés, L’Harmattan, Paris, avril 2008.

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