Pendant trois jours j’ai roulé à vélo sur la piste du canal des 2 mers, depuis Agen jusqu’à Toulouse. Une agréable virée qui m’a fait aller de découverte en découverte. L’itinéraire est jalonné de villes et villages où il fait bon musarder. Et les paysages sont agréables. La piste traverse en effet un immense verger, le plus grand de France. Ce verger est souligné d’un long trait vert, le canal des 2 mers qui relie l’Atlantique à la Méditerranée.
Cette échappée à vélo le long du canal des 2 mers commence pour moi à Agen, de bien belle manière. Presque symbolique. C’est en effet au pied de son fameux pont-canal que je prends possession de ma monture. Un vélo à assistance électrique fourni par le Café Vélo, une structure à la fois originale et efficace. Qui plus est, installée dans endroit charmant, une ancienne station de pompage mise en service en 1875.
Mes premiers tours de roue le long du canal des 2 mers me font d’ailleurs passer sous le pont-canal. C’est un ouvrage spectaculaire, l’un des plus grands et plus longs de ce genre. Il enjambe la Garonne à plusieurs dizaines de mètres au-dessus du fleuve. Ça doit faire tout drôle aux plaisanciers qui passent là en bateau lorsqu’ils songent au vide sous leur coque ! En tout cas, même à vélo, le site est impressionnant.
Direction, la vieille ville d’Agen. Elle est plutôt petite et agréable, j’ai bien aimé m’y promener. Je suis ainsi allé admirer la cathédrale Saint-Caprais ou encore le musée des Beaux-Arts, installé dans de magnifiques hôtels particuliers. A mi-chemin entre Bordeaux et Toulouse, Agen mélange la pierre blanche de l’une et la brique rouge de l’autre. Et marie aussi tous les styles : depuis les maisons médiévales à colombages de bois, comme dans le superbe îlot Beauville, jusqu’aux constructions Art Déco. Pas vilain du tout !
La véloroute du canal des 2 mers : 800 km de l’Atlantique à la Méditerranée
De l’Atlantique à la Méditerranée, de Royan à Sète, ce sont près de 800 km qu’offre la véloroute du canal des 2 mers. C’est sans conteste l’un des plus beaux itinéraires cyclables en France Il est développé et promu par un réseau de collectivités territoriales et leurs institutions touristiques.
Long de 240km, allant de Toulouse à l’étang de Sète, le canal du Midi a été construit au XVIIe s, sous Louix XIV, par Pierre-Paul Riquet. Cet extraordinaire ouvrage est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco.
Au XIXe, il a été prolongé par le canal de Garonne de Toulouse à Castets-en-Dorthe près de Bordeaux. L’ensemble forme le canal des 2 mers. Le long du canal de Garonne, la véloroute est entièrement bitumée. Ce qui n’est pas le cas le long du canal du Midi, où le VTT est préférable au vélo de route.
Mais la majeure partie de l’itinéraire du canal des 2 mers est bien ombragée. Du côté d’Agen, par exemple, il m’est arrivé de rouler sous une double haie de platanes particulièrement majestueux.
Jour 1, d’Agen à Moissac
+ 118 m / – 81 m 64,9 kmLe lendemain, c’est à nouveau au pont-canal que je retrouve la piste du canal des 2 mers pour m’élancer en direction de Moissac. Agen et ses faubourgs mettent un moment à s’effacer. Puis je ne vois plus de joggeurs, jusque là assez nombreux, ou de maîtres promenant leur toutou. Et je me retrouve dans un autre monde. Dans ce monde-là, les bruits sont gommés. Et tout est vert : les grands arbres jalonnant la piste, le canal, les bas-côtés et, derrière, les vergers.
Assez vite, je fais un premier arrêt. Obligé, ce café, une ancienne maison éclusière joliment aménagée et fleurie, me faisait de l’œil. De plus, le nom est marrant : La Poule à vélo ! J’y fais des rencontres sympas. Déjà devant ses fourneaux, la patronne n’a pas le temps de faire la causette. Contrairement à ses clients. Au-dehors, je regarde un vélo attelé d’une remorque et son propriétaire m’explique qu’il est parti pour une petite semaine de vacances avec ses deux fils. La remorque de Laurentino, un cadre dans l’automobile de 53 ans, contient tout leur matériel de camping.
Survient alors un autre équipage qui passe encore moins inaperçu. Ce sont deux restaurateurs de Socoa, dans les Landes, David et Vanina. Enfin, ils l’étaient encore il y a peu. Parce que maintenant ils sont partis pour un tour du monde de 5 ans -rien que ça!- avec leurs deux enfants sur de superbes attelages. Mais inutile de tout raconter car ils le font aussi bien que moi avec leur blog, cscd. Faut pas non plus compter sur moi pour vous détailler le nom de leur blog, j’ose pas… Là-dessus s’arrêtent deux autres voyageurs à vélo. Ce sont deux copains habitués aux grandes virées à travers la France, et tout le monde discute avec tout le monde. Même seul, on ne s’ennuie pas à vélo !
Sur les coups de midi, je fais mon entrée à Valence d’Agen, une charmante bourgade assise devant le canal des 2 mers. Le marché hebdomadaire, plutôt important puisqu’il occupe plusieurs rues et places, se termine. J’en fais le tour quand même, vite fait. Et ne résiste pas à la tentation : du bon miel proposé par un producteur du coin. Dommage que je ne puisse faire provision de ces fruits qui embaument l’air, à commencer par les melons et nectarines. Les régions que je traverse, surtout le Lot-et-Garonne ainsi que le Tarn-et-Garonne, sont le premier verger de France. C’est la terre d’élection -entre autres- de la fraise, de la tomate, du kiwi sans oublier le fameux pruneau d’Agen. La culture de fruits et légumes représente la première activité de ces départements toujours très ruraux.
En début d’après-midi, je quitte le canal des 2 mers pour monter à Auvillar, l’un des « plus beaux villages de France ». Un titre qui n’a rien d’usurpé ! Passée sa magnifique tour de l’Horloge, rien ne semble y avoir changé depuis longtemps. J’admire son étonnante halle aux grains, une construction circulaire du début du XIXe dont la charpente repose sur une vingtaine de colonnes. Les maisons sont toutes en briques à pans de bois et arcades. Pas mal de films ont d’ailleurs été tournés ici.
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Comme je dispose d’un VAE, les détours ne me font pas peur. Du coup, dans l’après-midi, je n’hésite pas en voyant un panneau annonçant à quelques km de mon itinéraire une église du XIIIe, la chapelle du Moutet. Bien m’en a pris. D’une simplicité séduisante, elle est entièrement en terre massive et torchis.
Ensuite, après un autre arrêt à Saint-Nicolas -où j’ai admiré son château et ses halles- en longeant le grand plan d’eau que forme la Garonne ici, direction Moissac.
Jour 2, de Moissac à Grisolles
+ 73 m / – 0 m 80,4 kmPas question de traîner : c’est une grande journée qui m’attend. Dès l’ouverture, je file à l’église abbatiale, en plein cœur de Moissac. C’est l’un des plus beaux édifices de mon périple, elle est inscrite à l’Unesco au titre des Chemins de Saint-Jacques. D’ailleurs, plusieurs pèlerins avec la coquille sur leur sac m’ont devancé. Comme eux, je prends mon temps pour admirer cette église, en commençant par le tympan. Le cloître roman du XIIe est particulièrement remarquable : je m’y suis pas mal attardé, il en vaut vraiment la peine.
Et c’est reparti. Par un pont-canal, un autre, bien joli à regarder aussi. La première étape est Castelsarrasin, tout à côté du canal des 2 mers. Un gros bourg, apparemment bien tranquille mais pas dénué d’intérêt. J‘en fais le tour en terminant par l’église St-Sauveur. Elle abrite entre autres du beau mobilier provenant de l’abbaye cistercienne de Belleperche, non loin d’ici, que je ne connais pas du tout.
Ce qui explique sans doute pourquoi, un peu plus tard, j’ai voulu y faire un crochet en voyant un petit panneau l’affichant à « 5 km » mais sans préciser à droite ou à gauche. Plutôt que de dégainer mon smartphone et son GPS, je demande dans quelle direction aller à un pêcheur au bord du canal. Qui m’envoie à l’opposé. Il avait pourtant l’air sûr de lui. Du coup, en regagnant la piste du canal des 2 mers, j’arrête les frais. Tant pis pour l’abbaye, la matinée avance trop vite.
Sur le canal des 2 mers je croise ou dépasse régulièrement des embarcations. Le plus souvent des pénichettes ou un gros bateau de plaisance, voire un voilier démâté qui avance au moteur. On ne manque pas de se saluer, parfois d’échanger quelques mots. Là, c’est un kayak. Visiblement, le gars qui mouline de la pagaie, bien que chargé -un tonneau étanche est arrimé sur la pointe arrière- semble pressé d’arriver. Ce n’est pas pour tout de suite, m’explique-t-il le souffle court : il fait exactement le même trajet que moi, en sens inverse toutefois. Chapeau, car c’est du sport !
En fin de matinée, j’arrive à Montech et à sa fameuse « pente d’eau ». Un ingénieux système qui fait tracter les bateaux par une micheline pour leur éviter une succession d’écluses. L’endroit est bâché, car des travaux sont en cours pour remettre tout ça en service après une vingtaine d’années d’inactivité, et j’ai du mal à me le représenter. En tout cas, ici je bifurque pour pédaler le long d’un autre canal, le canal de Montech, en direction de Montauban. En fin d’après-midi, je referai le même chemin, dans l’autre sens. Et je ne m’en plains pas car ce canal est franchement plaisant. Pourquoi ? La sérénité qu’il dégage, ses courbes, car il n’est pas rectiligne. Le nombre d’écluses peut-être aussi : j’en ai parfois deux ou trois en vue. Sachant qu’il faut pas mal de temps pour chaque, une chose est certaine : le vélo est beaucoup, beaucoup plus rapide que le bateau !
Montauban : la plus rose des villes roses ! D’emblée, j’aime cette ville, les rues étroites et piétonnes de son cœur historique. Et sa place Nationale aux magnifiques arcades. Évidemment, j’ai aussi fait un arrêt au musée Ingres. J’ai redécouvert avec plaisir ce grand peintre -et vu son violon- ainsi qu’un autre artiste, le sculpteur Antoine Bourdelle, autre enfant de Montauban. De plus, le musée est installé dans l’ancien palais des évêques, qui mérite le détour en soi.
Jour 3, de Grisolles à Toulouse
+ 225 m / – 176 m 58,4 kmL’herbe est toujours plus verte ailleurs : je ne peux m’empêcher de faire une nouvelle infidélité à la piste du canal des 2 mers. Pas bien loin, 5 ou 6 km, cette fois pour aller faire un tour à Grenade-sur-Garonne. Une petite ville bien agréable, dont les rues se croisent à angle droit. Cette ancienne bastide se serre autour d’une belle halle du XIVe, sans doute l’une des plus grandes et plus anciennes de France.
Puis je retraverse le canal des 2 mers. Direction Fronton et son vignoble, sur les hauteurs. Par pure curiosité : à vélo, pas question de goûter les vins, surtout par ces chaleurs. Pas possible non plus d’en emporter. Non, mais relever quelques adresses peut-être. A la Maison des vins, par exemple, qui présente au château Capdeville, une belle demeure à l’écart du village, la totalité de la quarantaine de vignerons. En tout cas, ici le décor change, avec les vignes. D’ailleurs, certaines sont très jolies et fleuries.
Retour sur la piste du canal des 2 mers, pour la dernière ligne droite jusqu’à Toulouse. Pendant un bon moment, je longe le joli lac du Bocage, invitation à la baignade. Il me fait envie, la température commence à bien monter… L’environnement reste très bucolique. Mais çà et là émergent les signes précurseurs de la grande ville. J’y parviens aux ponts jumeaux, à la jonction du canal du Midi et du canal de la Garonne. Et c’est quasiment sans quitter de piste cyclable que je me retrouve devant la Maison du vélo, face à la gare centrale.
En fin d’après-midi, je découvre la ville rose, celle que célèbre si bien Claude Nougaro. A vélo, évidemment !
Informations pratiques
Le site du Canal des 2 mers à vélo est très complet : il fournit cartes, plans détaillés, toutes les adresses que ce soit de réparateurs ou d’hébergement, renseignements touristiques… Incontournable et bien fait !
Le Routard du « Canal des 2 mers à vélo » est le topoguide parfait : itinéraires, plans (étape par étape), bonnes adresses… tout y est. Prix 15 euros. Autre option non utilisée, le topo-guide Le canal des 2 mers à vélo – de l’Atlantique à la Méditerranée des éditions Chamina.
Bonnes adresses
- A Agen, le Stim’Otel (3*) est bien situé, non loin de la gare et du centre historique. Rénové récemment. Accueil vélo.
- A Valence d’Agen, le restaurant Le Tout va bien mérite bien son nom. Très couru par les gens du coin, ce qui est toujours bon signe, il propose face au marché et non loin du canal, une cuisine généreuse à prix doux.
- A Moissac, à deux pas de sa fameuse abbaye, l’hôtel Le Chapon fin (3*) entièrement rénové offre des chambres très confortables. Accueil vélo.
- A Moissac, restaurant du Moulin de Moissac. Une adresse aussi classe que gourmande ! Dans l’assiette, que des produits frais que l’on savoure dans un cadre de rêve : une superbe terrasse face au Tarn, majestueux. J’y ai passé des moments très agréables.
- Au bord du canal de Montech, à mi-chemin de Montauban, le restaurant « Chez Gabriel ». Une escale idyllique dans une ancienne maison éclusière, agrandie avec goût, où l’on sert une cuisine excellente à prix très doux. Accueil Vélo. Et ça se sait, l’adresse est très courue.
- A Montech, dans une autre maison éclusière, le « Bistrot Constant ». Un bel endroit, doté notamment d’une grande terrasse : une adresse franchement gastronomique, avec des plats inventifs et recherchés. Au regard de ce que j’ai trouvé dans l’assiette, les prix sont plus que raisonnables.
- A Grisolles, vraiment au bord du canal mais cachée, « La Villa toulousaine », des chambres d’hôtes dans une belle demeure ancienne. Très confortable et calme, accueil sympa.
- A Toulouse, l’hôtel Royal Wilson (2*). Facilement accessible à vélo et très central, il est situé en bordure d’un quartier très animé, à deux pas du Capitole. Une bonne adresse, calme et confortable. Accueil Vélo.
- A Toulouse, le restaurant Oh la Vache se flatte de prix franchement tout doux. Ce qui ne l’empêche pas de servir les meilleurs magrets de canard loin à la ronde !
- A Toulouse, découvrir la ville à vélo avec Sylvain, un Toulousain de souche, passionné et passionnant. C’est avec lui que j’ai découvert le centre-ville à vélo.
Journaliste professionnel venant de la presse régionale, j’ai toujours aimé bouger. Au fil de mes pérégrinations, j’ai découvert le voyage à pied et à vélo, que j’apprécie énormément l’un comme l’autre. Et plus j’en fais, plus j’en redemande !