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Ararat, Le mont de l’Arche de Noé

Ararat, Le mont de l’Arche de Noé - Monts Taurus et Ararat

Focus Rando :Ararat, Le mont de l’Arche de Noé

Différentes religions mettent en relation leur genèse avec cette montagne. Qu’il s’agisse d'Utnapishtimen pour les anciens sumériens, védiques et babyloniens, de Nuh pour les musulmans ou de Noé pour les chrétiens, toutes ces cultures racontent l’existence d’un homme “juste et accompli avec les gens de son époque” qui a construit un grand bâteau dans lequel il a pu sauver toute la biodiversité de son monde. Un déluge universel fit disparaître toute la terre sous les eaux et avec elle tous les êtres vivants qui l’habitaient. Après plusieurs jours de naufrage sous la force des vagues et de la tempête, l’arche échoua au sommet d’une montagne, le Mont Ararat, d’où la vie put se répandre de nouveau et “…Dieu créa l’Arc-en-ciel…”

Ce dont je suis sûr c’est qu’au-delà de toute polémique existante sur le déluge entre géologues, croyants, explorateurs et savants marcheurs avec leur omelette espagnole et leur vin rouge, j’ai toujours été attiré par le pouvoir des montagnes à inspirer un intense sentiment sacré, ou ce que chacun comprend à ce sens.

Des Andes au Tibet, à l’Indonésie ou à l’Afrique, des incas, hindous, bouddhistes, grecs aux Kikuyu du Kenya ou hawaiiens du Kilauea, dans le monde entier, les montagnes sont vénérées comme des lieux mystérieux, pleins de légendes et de croyances qui donnent sentiment et vitalité à l’existence de leurs cultures. Les montagnes sont pleines de mythes, désirs, sentiments d’admiration et respect révérenciel comme sources de vie et d’inspiration.

L’Ararat est l’une des montagnes les plus sacrées au monde. Elle n’incarne pas seulement aspirations, valeurs et idéaux transcendantaux pour de nombreuses civilisations anciennes et actuelles en Orient et en Occident, c’est aussi un lieu vraiment spécial, ou du moins curieux, perdu entre les steppes de l’Iran, l’Arménie et la Turquie, un paysage auquel on parvient en passant par des chemins très variés, allant du pèlerin qui fait la traversée de sa vie, ne sait rien des montagnes et croit pleinement en sa foi en séchant ses larmes lorsqu’il ne lui reste plus qu’à toucher le ciel à l’alpiniste globe-trotter, nerveux à l’idée d’atteindre le sommet et de savoir ce que va lui révéler l’horizon, à quelle nouvelle destination rêver.

Je crois que tous ceux d’entre nous qui circulons sur ses versants et atteignons son sommet ces jours-là, nous nous sentons chanceux. D’un paysage unique et indissociable à l’histoire de l’humanité nous revenons tous avec de nombreuses sensations et de nombreux souvenirs, mais chacun les siens. Nous en profitons!

Nous avons mis trois jours pour le gravir. En prenant bien en compte l’absence d’eau et surtout l’acclimatation, on gagne rapidement de l’altitude. Sans l’adaptation climatique lors de la traversée de la Cordillère de Taurus, il est recommendé de prendre quelques jours de plus pour monter au sommet en toute sécurité.

Camp 1 (3 200 m) et Camp 2 (4 200 m)

Après une heure de voyage depuis Dogubeyazit, nous arrivons au point auquel se trouvent les chevaux qui vont nous aider à porter une partie de notre équipement commun et l’eau. Nous suivons un sentier poussiéreux, évident et vaste qui monte jusqu’à 3 200 mètres d’altitude. C’est là que nous situons notre premier camp de base. Nous montons ensuite près d’une centaine de mètres pour améliorer l’acclimatation et profiter du labyrinthe de roches qui nous entoure et offre un beau coucher de soleil. La nuit tombée, personne ne peut et ne tente de faire taire une expédition féminine iranienne. Nous nous joignons donc à la nuit, aux étoiles et à la fête en chantant et dansant assez longtemps.

Le jour suivant nous continuons l’ascension avec un rythme plus conservateur. Nous gagnons une nouvelle altitude dans ce voyage. Nous atteignons les 4 200 mètres d’altitude et les langues de laves d’anciennes éruptions qui s’étendent au pied de la montagne sont l’image la plus nette du terrain volcanique où nous passons. Notre nouveau camp de base est rocailleux et peu vaste. Les chansons se font plus fortes et résonnent dans la montagne. L’expédition iranienne arrive épuisée et, sans s’arrêter de rire, se partage l’espace libre qu’il reste: cette nuit nous n’allons pas à la fête car demain il faut se lever tôt, mais de toute façon elle nous accompagne dans notre sommeil.

Sommet

Aujourd’hui c’est le grand jour! Nous le savons car les cris et les chansons qui nous lèvent sont plus forts que jamais… Environ 1 000 mètres ascendants de dénivelé nous attendent suivis d’une descente de plus de 2 000 mètres. Nous nous levons tôt pour que le jour nous rattrape.

Comme sur la majorité des terrains volcaniques, la zone élevée est instable et recouverte de roches, sable et pierres de toute taille. Nous marchons en prenant garde à ne rien envoyer au compagnon qui suit jusqu’à arriver à la zone glaciaire où les crampons nous apportent de la sécurité sur la glace. Je me souviens d’un lever du jour magnifique, bien accompagné et très orangé, qui se projetait sur le cône parfait du Kucuk Agri (3 896 m) volcan satellite de l’Ararat.

Enfin de la neige et de la glace! Des rampes allongées nous séparent du sommet. Un par un, nous arrivons à passer. Nous nous mélangeons, savourant notre moment sur l’Ararat. Il passe du temps avant que les chants iraniens ne nous rattrapent. Ils se joignent aux chants turcs, catalans, basques, des Baléares, canariens et au chant de l’unique péruvien. Comme il y a toujours de nouveaux horizons à découvrir, nous nous promenons sur le faux sommet voisin pour voir ce qui se cache plus loin.

Nous célébrons un peu plus l’évènement puis entamons une longue descente à faire nos adieux aux enfants nomades souriants des zones basses. Nos pas nous mènent jusqu’à Dogubeyazit où nous dînons royalement. Cette fois il y a du vin et plus de joie autour de la table. Nous nous en allons satisfaits, sains et finalement sans mot pour décrire ce que nous avons vécu et qui fera place à de bons souvenirs. Le jour suivant, nous nous envolons pour Istanbul. Que la fête commence! L’étape suivante comprend la basilique Sainte Sophie et la tour Galata, l’éclat de la Mosquée bleue, les ruelles, le brouhaha du Grand Bazar et cette tombée du jour flamboyante sur la mer qui rafraîchit une ville hyperactive, enveloppée par l’arôme des épices, la brise, la diversité ethnique et au charme enchanteur.

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