J’ai consacré mon été à une découverte approfondie des Pyrénées à pied, que j’ai rejoint à vélo depuis le Jura. Ce récit de mes 5 jours de randonnées dans les Pyrénées de Vielha à Salau est une partie de mon escapade dans les Pyrénées.
Jour 1 : De Vielha à Clots de Monnas
+ 1120 m / – 100 m 14 km Aucune difficulté. Hors sentier à la fin.Après un passage /ravitaillement à Vielha, je poursuis mon cheminement à travers les Pyrénées. La chaleur écrasante, la fatigue, le manque de motivation et mes jambes lourdes font que j’ai quelques réticences à monter droit dans le pentu (j’aurais mieux fait) et c’est donc en suivant la Garonne, qui n’est ici qu’une modeste rivière, que je sors de Vielha. Je traverse les magnifiques villages de Garos, Arties et Gessa puis décide enfin de monter en suivant la sente qui va à l’ermitage Sant Martin. A une bifurcation vers 1450 m, je dois sortir la carte et décide de continuer à remonter le Barranco de Corilha. Je ne suis pas dans une grande forme aujourd’hui, aussi, les quelques endroits bien plats et la profusion d’eau m’incitent à m’installer aux Clots de Monnas pour la nuit.
Jour 2 : De Clots de Monnas à la cabane du Past à 1960 m
+ 1115 m / – 1230 m 24 km Du hors sentier et du sentier non balisé en majorité. Quelques passages délicats sur la dernière section.Ma journée commence par du hors sentier pour rejoindre le col à 2445 m situé entre le Tuc d’Arenho et le Tuc Dera Pincela. C’est là que je me rends compte que si j’étais montée droit au dessus de Vielha, une belle piste m’aurait amenée jusqu’aux petits lacs que je vois en contrebas et le terrain eût été plus facile… Je passe vers les lacs Treuetes et descends couper la route vers le Coret de Varados à 2049 m. Ensuite, une longue traversée descendante hors sentier ou sur des sentes de bestiaux me fait atterrir au Plan de Tor. Je n’ai ensuite qu’à remonter le vallon superbe d’abord jusqu’au bout de la piste carrossable (mais c’est par un sentier parallèle que j’y vais). Je quitte plus haut tout balisage et me dirige, par un sentier qui offre de belles vues sur le fond du vallon et le lac de Liat, jusqu’au petit col à l’Ouest du Pic de Combe Barrade, qu’il faut prendre soin de ne pas confondre avec le Port dera Horqueta, proche voisin.
Je passe en France où un sentier mène jusqu’à l’étang de Chichoué, tout près des anciennes mines de Bentaillou dont il reste tous les baraquements… et pas que. Au niveau du lac de Chichoué, je reste au sud du ruisseau et trouve la sente qui reste à niveau sur des kilomètres. Des galeries des anciennes mines y débouchent régulièrement. Ce chemin est aujourd’hui assez peu emprunté et pas ou mal entretenu. Quelques passages nécessitent l’attention, mais je n’ai pas été obligée de rebrousser chemin. L’orage menaçant, je ne traîne pas pour arriver au refuge de Past, qui est fermé. Cependant, une jolie pelouse entretenue autour de la maisonnette me permet de planter la tente à l’abri du vent. Je devrai cependant retourner jusqu’à la source avant le ruisseau de la Tartereau pour prendre de l’eau. Il me plaît de cheminer sur les vestiges des exploitations minières et d’imaginer la vie et l’effervescence qui animaient alors ces lieux dans des coteaux aussi raides. Travail titanesque de taille et d’aménagements… en milieu hostile et terrain scabreux.
Jour 3 : Du refuge du Past à la cabane du Clôt du Lac
+ 1400 m / – 1565 m 21.5 km Pas de difficultés techniques notoires, un peu de navigation. Descente peu roulante du vallon d’Orle.En poursuivant le sentier qui s’est transformé en chemin depuis le Past, je rejoins le vallon d’Urets et la cabane du même nom. Je remonte tout le vallon, équipé de ruines de pylônes rouillés, figures fantomatiques dans la brume matinale. Il en est ainsi jusqu’au Port d’Urets à 2512. Des vestiges d’infrastructures minières occupent le haut du col, le sentier est taillé dans le bloc. Au col, une cabane originale magnifique peut servir de logis pour une personne. Je bascule de nouveau en Espagne où le ciel bleu est bien présent et constate avec satisfaction que les chemins miniers continuent, je les suis avec curiosité. Il s’agissait donc d’installations franco-espagnoles. Tunnels, restes de baraquements au dessus du superbe lac de Montoliu. Je n’ai pas vu âme qui vive depuis que j’ai quitté le vallon de Liat. En mode sanglier je vais passer au colhada Nera à 2567 m, qui porte bien son nom puis chemine plus ou moins à flanc dans les ruines de la plus haute exploitation minière européenne à 2500 m environ sous le Mail de Bulard.
Restes de rails, de wagonnets, tas de gravas excavés et nombreuses galeries. Sur la carte je suis un certain GR211, mais le lieu est toujours aussi désert. Contraste profond avec ce qu’il devait être… Je marche ainsi à plat jusqu’au Port d’Orle, où toute trace d’exploitation cesse. Je suis en haut d’une des vallées les plus sauvage et encaissée de l’Ariège. De plus, en l’espace de 50 mètres, je quitte le soleil espagnol et le ciel bleu pour un brouillard humide et très épais. Les volutes dansent et turbulent côté Couserans tandis que c’est le calme plat versant Ibérique. Visibilité 10 mètres ! Je descends la vallée de l’Orle à l’aveugle en me disant que si je dois me retrouver nez à nez avec un descendant de Canelle, ce sera ici ! Je ne vois pas la cabane du port d’Orle et ignore celle de Hounta un peu plus bas. La visibilité à cette altitude est meilleure, je prends ensuite la voie Decauville, où je retrouve des vestiges miniers et rejoins le GR10 sous la cabane du Besset. Finies la tranquillité et la solitude, je croise quelques personnes. Je suis toujours dans le brouillard, monte dare-dare jusqu’à la cabane du Clôt du Lac où je m’installe pour la nuit. J’y suis seule. Il me faut aller loin pour l’eau mais je finis par en trouver. Cet été caniculaire a tari bien des sources et points d’eau habituels…
Jour 4 : De la cabane du Clôt du Lac à la cabane de La Lanne
+ 1515 m / – 1535 m 21.5 km Compliqué en terme de navigationCe matin les vallées sont totalement englouties par les brumes. Je pars donc sur le seul cheminement dégagé, à savoir la crête qui passe par le Tuc de Pourtillou, le terrain n’est pas simple, parfois aérien, l’ambiance bien montagnarde. Je vais ainsi jusqu’au port de Cornave appelé aussi Passage des Chèvres, laisse à ma gauche bien en contrebas la cabane de la Trinque et rejoins en mode sanglier la cabane de Barlonguère.
Le soleil est là maintenant, je passe le Port de Barlonguère, négocie comme je peux la descente jusqu’à l’étang Long que je longe avant d’aller pique niquer tout en discutant avec la bergère avec une vue splendide sur l’Etang rond en contrebas. Depuis que j’ai rejoint le vallon de Barlonguère, je croise du monde. Pas pour longtemps car je remonte ensuite jusqu’au col de la Clauère à 2522 m et vais comme je peux, suivant plus ou moins des sentes dans le coteau très raide jusqu’au Port d’Aula à 2260 m. Sur cette section je me retrouve nez à nez avec un groupe de cerfs aux andouillers impressionnants. Au Port d’Aula, j’avais prévu de descendre dans le vallon du Bidet puis de l’Artigue afin d’aller me ravitailler à Seix, mais côté français le brouillard très humide et très épais est tenace et je décide de rallonger la sauce pour aller jusqu’au Port de Salau en profitant du soleil, en espérant dormir dans la cabane indiquée au col. Parvenue au Port de Salau, la météo en France est toujours aussi moche, je lis en vitesse et dans le vent violent toutes les explications sur les différents échanges franco espagnols, passage de bois, mais aussi d’humains lors de la Retirada. Le refuge est totalement insalubre, je descends jusqu’à la cabane de La Lanne, originale et bienvenue, et m’y installe pour la nuit. Je discute un moment avec le berger Pablo qui plus tard rejoint la sienne, la cabane de Pouill.
Jour 5 : De la cabane de La Lanne à Salau
+ 0 m / – 1015 m 8.3 km Compliqué en terme de navigationAujourd’hui je découvre une autre de ces vallées du Couserans, toutes très sauvages, quasi austères. Les versants en sont abrupts et peu avenants. Joli terrain de jeu pour le mode sanglier… Je me contente de suivre le sentier qui ne fait que descendre. Le torrent est gonflé par l’eau qui descend du vallon du Lauzeron, puis du Bégé, du Léziou, du Mail, du Maillet, Anglade, Fontaret et Saubé. Le tout file direct à Salau, cul de sac de la route qui vient de Couflens, Seix. Pour ma part, arrivée à Salau, je tends le pouce pour descendre me ravitailler à Seix.
Veillez à ne laisser aucune trace de votre passage dans ces milieux fragiles. La montagne ne nous appartient pas. Merci.
Après 16 ans passés dans l’industrie à rêver d’être dehors, m’y voila. Cela fait 18 ans que je suis accompagnatrice en montagne et que je partage mon temps entre cette activité et des voyages au long cours à vélo, à pied, à skis… Je suis également auteure.