Depuis l’époque où j’ai réalisé cette randonnée, je suis retournée sur le sentier Cathare, le GR®367, et je vous ai écrit un guide pratique complet avec trace GPS sur ce sentier de Grande Randonnée.
Qui sont les cathares ?
Question à laquelle, il est préférable de répondre d’entrée de jeu sous peine de ne pas partir sur de bonnes bases de lecture.
Levons une fausse idée tout de suite : on entend parfois parler à tord de châteaux Cathares alors qu’il serait préférable de parler de châteaux en pays Cathare. Vous allez comprendre pourquoi ?
Les cathares sont des Chrétiens primitifs, entendez par là non pervertis par la société et ses tentations contrairement aux Chrétiens rattachés à la papauté si l’on en croit les Albigeois. Leur religion, basée sur le dualisme entre le bien et le mal, est régie par des principes stricts d’ascétisme. Ils sont végétariens, croient à la réincarnation, s’abstiennent des désirs charnels et sont indifférents aux bien matériels. Ils sont ordonnés par le sacrément du Consolamentum par lequel un croyant devient un Bon homme, un prêtre Cathare en quelque sorte. Dès lors comment et pourquoi construire des forteresses défensives ? Aucune raison. Les châteaux sont en réalité des citadelles appartenant à des comtes ou ducs dans lesquels les Cathares viendront se réfugier lors des Croisades du XIIIe siècle. J’y reviendrai un peu plus tard.
Par dérision, les catholiques préfèreront les appeler les « parfaits » puis par le terme d’Albigeois, sans doute en référence à la prise d’Albi en 1209. Pour la Papauté, ce sont tout simplement des hérétiques.
L’utilisation du mot cathare ne serait venu qu’au XXième siècle pour définir les hérétiques du sud de la France.
En 1165, la tentative de conciliation entre catholiques et cathares est un échec. Deux ans plus tard, le concile cathare de Saint-Félix de Caraman crée les quatre évêchés cathares d’Albi, Toulouse, Agen et Carcassonne.
La croisade contre les Cathares
Le Pape Innocent III, élu en 1198, voit d’un mauvais œil l’extension du catharisme dans le sud-ouest de la France. Il envoie à plusieurs reprises des émissaires pour tenter d’évangéliser les cathares ; le plus illustre d’entre-eux est Dominique de Guzman, qui deviendra Saint Dominique, le créateur de l’ordre des Dominicains, ceux la même qui composeront quelques années plus tard le tribunal de l’Inquisition. En vain. A ce propos, Saint Dominique, conscient de son échec, dira : « J’ai prêché depuis des années en pleurant, en suppliant… là où ne vaut la bénédiction, prévaudra le bâton… ». Il le savait fort bien.
Le Pape Innocent III ne cherche plus qu’un prétexte pour commencer sa croisade et en finir avec l’hérésie cathare. L’assassinat en 1208 du légat Pierre de Castelgnau (par le comte Raymond VI de Toulouse ?) arrivera à point nommé.
L’année 1209 marque le début de la croisade contre les Albigeois. La chevalerie du nord de l’actuel France s’empare de Béziers le 21 juillet et massacre au moins 20 000 habitants, 200 000 annoncent même certaines sources. La cité est pillée puis incendiée. Le légat du Pape Arnaud Amaury dira à cette occasion : « Tuez les Tous, Dieu reconnaîtra les siens ». Après Béziers, Carcassonne tombe le 1er août aux mains des croisés.
Simon de Montfort prend la tête de la croisade à la demande du légat du Pape. Dès lors, la guerre des châteaux peut commencer. Il s’agira pour le Pape d’éradiquer les cathares et pour le roi de France d’étendre son royaume vers le sud. L’union fait la force et les seigneurs du sud-ouest de la France n’ont pas su appliquer le dicton !
Ma randonnée en Pays Cathare
Cette randonnée en Pays Cathare avec La Balaguère part sur les traces des dernières citadelles du vertige comme les a nommé Michel Roquebert. Nous découvrons trois des cinq fils de Carcassonne : Quéribus, Peyrepertuse et Puylaurens auxquels il faut ajouter les châteaux de Monségur et de Puivert. Une randonnée, entre Aude, Pyrénées Orientales et Ariège, où la garrigue se mêle à la forêt et l’accueil dans les villages, aujourd’hui presque dépeuplés, s’avère sincère et chaleureux.
Quéribus, le dernier bastion cathare
Depuis le col du Grau de Maury qui marque la frontière entre l’Aude et les Pyrénées Orientales, nous montons au château de Quéribus, littéralement le rocher des buis. Il surplombe la plaine du Roussillon, les Albères, le Canigou et la Méditerranée au loin. De suite, on comprend l’axe stratégique de la forteresse.
Cet énorme bastion cathare, perché sur un éperon rocheux à 150 mètres au-dessus du col, était une des citadelles imprenables du Pays Cathare. Edifié au XIème et XIIème siècle, le château est commandé par Chabert de Barbaira, ancien ingénieur militaire du roi d’Aragon acquis aux idées albigeoises. La forteresse fut un refuge important d’hérétiques cathares : Pierre Paraire, le diacre du Fenouillèdes, Benoît de Termes, diacre du Razès et Raymond de Narbonne y séjournèrent pour se protéger de la Croisade.
Le château a été officiellement acheté par Louis IX au régent d’Aragon en 1239 mais Chabert de Barbeira ne l’entend pas de cette oreille et ne délivre pas le bâtiment à la papauté ni à la France.
En 1255, onze ans après la chute de Montségur et quinze ans après celle de Peyrepertuse, Quéribus est contraint de céder la citadelle au Sénéchal de Carcassonne pour rester en vie. Le dernier bastion tombe aux mains des croisés.
Un escalier, taillé dans le roc, permet d’entrer au cœur de la forteresse. Archères, mâchicoulis, meurtrières, assommoirs et bretèches permettent de défendre efficacement la citadelle. La forteresse est constituée d’un corps de logis, de salle de stockage, de citernes et d’un donjon. Le donjon est une tour polygonale située dans la troisième enceinte au plus haut de la falaise. Elle a fait parlée beaucoup d’elle car on y trouve à l’intérieur un pilier central cylindrique de type gothique qui selon l’hypothèse de certains historiens constituerait un calendrier solaire.
En 1255, le château est érigé en forteresse royale pour assurer la protection de la frontière avec l’Aragon jusqu’au traité des Pyrénées de 1659 qui déplace la frontière plus au sud. Quéribus perd alors son importance stratégique même si une petite garnison y est maintenu pour éviter que la forteresse soit prise d’assaut par des brigands. Abandonné à la Révolution, le château tombe dans l’oubli jusqu’à son classement en Monument Historique en 1907. Les premiers travaux de réfection ne débutent toutefois qu’en 1951. Aujourd’hui, la forteresse accueille de 80 000 à 100 000 visiteurs par an.
Après avoir dégusté un bon Maury en guise d’apéritif, nous prenons notre déjeuner à l’orée d’une clairière puis quittons le château par un large sentier qui rejoint le village de Cucugnan. Il est connu grâce à Alphonse Daudet. On le situe souvent en Provence pour cette raison mais c’est bel et bien dans le Pays Cathare qu’il se trouve. Il est intéressant à plus d’un titre.
Alphonse Daudet mais bien d’autres artistes ont fait l’écho de l’histoire rocambolesque du curé de Cucugnan. L’Abbé Marti, curé de Cucugan se morfondait tous les dimanches dans son église vide. A force de méditer, la solution lui apparaît un jour. Il réussit à rassemblait tous les cucugnanais dans son église. Dans son sermon, il raconte son voyage du paradis à l’enfer en passant par le purgatoire. Son souci, c’est qu’aucun curcugnanais n’est au paradis ou au purgatoire. Tous sont en enfer. Là-dessus, un orage éclate. Il n’en fallait pas plus pour que tous les curcugnanais se repentissent.
Autre intérêt du village, on y trouve dans l’église une vierge enceinte en polymorphe qui date du XVIIème siècle. Elle traduit le premier verset du chapitre XII de l’Apocalypse qui dit “Une femme revêtue de soleil qui avait la lune à ses pieds, et de laquelle doit naître un fils enlevé vers Dieu”. Ce type de représentation de la Vierge sont très rares puisque le Concile de Trente (1545 – 1563), rassemblant des Evêques de l’Eglise Catholique, interdit l’usage de Vierge enceinte. Elles furent en très grande partie détruites.
Il est temps de quitter le village de Cucugnan par une bonne piste qui passe à travers les vignes et de rejoindre le village de Duilhac sous Peyrepertuse où nous nous installons au gîte d’étape communal (gite.duilhac@wanadoo.fr)
Peyrepertuse, le vaisseau en plein ciel
Après avoir rempli les box à pique-nique, nous remontons le sentier cathare qui conduit au château de Peyrepertuse. C’est sous un soleil de plomb que nous progressons à travers la végétation arbustive. Nous ne tardons pas à transpirer à grosse-goutte comme un torchon humide qu’on essorerait à souhait. C’est avec délectation que les chênes verts nous abritent de temps en temps du soleil. La température du corps semble alors chuter vertigineusement.
Peyrepertuse – la pierre percée – est pour moi le plus bel ensemble d’architecture militaire du Languedoc au Moyen-âge. Tout en longueur comme le vaisseau spatial d’Albator, il épouse la crête à prêt de 800 mètres d’altitude et offre une vue imprenable sur la garrigue et les vignes. Il permettait surtout de garder un œil sur les différentes vallées qui l’entourent et de contrôler les cols ou de communiquer des signaux au château de Quéribus un peu plus au sud.
Il faut en réalité distinguer deux châteaux sur le site de Peyrepertuse : le château féodal situé en bas qui date du XIème siècle et le château royal, construit sur le Roc Jordi au XIIIème siècle.
Nous visitons d’abord le château du bas avec son vieux donjon, l’église romane Sainte-Marie, le logis du gouverneur et les citernes. Nous empruntons l’escalier Saint-Louis, poli par les passages répétés des visiteurs, et montons au château royal construit sur le point culminant de l’arête.
Depuis le rocher de Jordi, superbe vue sur vers l’ouest en direction du roc de Sagnes mais aussi sur le château féodal.
Après l’échec du siège de Carcassonne en 1240, Guillaume de Peyrepertuse se résigne à laisser le château, pourtant réputé inexpugnable, à Jean de Beaumont qui dirige l’armée des croisés. Comme Quéribus, Peyrepertuse devient un redoutable bastion dans la défense de la frontière avec l’Aragon.
Nous redescendons sur une portion de sentier que nous avons utilisé ce matin pour la montée et partons en direction du col de Lapres (601 m). Nous nous arrêtons peu après pour pique-niquer sous un magnifique chêne, bien à l’abri du soleil.
L’après-midi, en passant le pla de Brézou, nous avons la chance d’observer trois isards, le cousin du chamois des Alpes, se dressant fièrement sur la pointe de la Quille (964 m). Au petit jeu de savoir qui regarde qui, nous ne savons pas encore qui a gagné.
Après le col de Corbasse, nous ne tardons pas à entrer dans les gorges de Galamus sans oublier de pénétrer dans l’ermitage Saint Antoine où le dernier ermite quitta les lieux en 1870. Dans les entrailles des eaux serties de vert qu’à creusé l’Agly, la rivières des aigles, les amateurs de canyoning s’en donnent à cœur joie.
Après un court transfert en véhicule, nous gagnons le gîte d’étape de la Bastide tenu par Néli, Eva, Élise, Manfred et Richard, et labellisé Accueil Paysan. Richard est un paysan actif dans l’association et n’hésite pas à parler de ses engagements pour une ruralité et une agriculture plus proche de la nature. Le Pech de Bugarach fait face au hameau. De l’autre côté de la montagne se trouve le village de Bugarach pris d’assaut par des illuminés. En effet, selon une prédiction, le village serait un des cinq lieux sur terre à survivre à l’apocalypse qui se tiendrait en décembre 2012. On se croirait en plein Da Vinci Code !
Le lendemain, nous gagnons Caudiès-de-Fenouillèdes par le sentier des facteurs. Le temps est bouché. Si nous avons moins chaud, le panorama reste bien invisible.
Nous pique-niquons sous les oliviers de la chapelle de Laval. Nous empruntons les gorges de Sant Jaume (Saint-Jacques) et passons face au château de Saint-pierre et au castel de Sabordas. Nous nous engageons sur la variante sud du tour du Pays Cathares pour rejoindre le gîte d’étape labellisé Accueil Paysan du hameau d’Aigues-Bonnes. Un petit coin paumé qui ravira les âmes en quête de tranquillité. Comme hier soir, nous goûtons les produits de la ferme ou de producteurs locaux. Nous nous couchons repus.
Puilaurens, la citadelle du Fenouillèdes
Nous voilà partis pour le château de Puilaurens. Et pourtant, nous avons eu du mal à quitter Colette et Christian, éleveurs de vaches Aubrac qui proposent le gîte et le couvert aux voyageurs de passage. Enjouée, Colette a toujours un petit mot sympathique pour ses hôtes ; Christian, plus en retrait, est un nounours charmant dès que la glace est brisée. Alors ce matin, forcément, ça a trainé un peu. Sur le sentier aussi d’ailleurs, car les merveilleuses lasagnes tombaient encore sur l’estomac. Non pas qu’elles étaient indigestes, mais plutôt parce que tout le monde en a repris par gourmandise.
Le temps est toujours aussi gris qu’hier. Puylaurens, charmant village, est situé au pied du château de Puilaurens. Nous y montons par un sentier raide.
La construction du château de Puilaurens remonterait au Xème siècle. Cette forteresse est perchée sur un éperon rocheux dominant la vallée de la Boulzane à 697 mètres d’altitude et verrouillait les portes du Fenouillèdes.
Vers 1250, le château passe aux mains de la royauté française. Par une lettre d’août 1255, Louis IX ordonne au sénéchal de Carcassonne de fortifier le château. Saint Louis le fit renforcer pour défendre le Languedoc contre les incursions espagnoles. Le traité de Corbeil en 1258 passe le château au rang des forteresses de défense face à l’Aragon.
Il fait alors partie des “Cinq fils de Carcassonne” avec les châteaux de Quéribus, Peyrepertuse, Termes et Aguilar, tous situés en haut de pitons rocheux dits imprenables.
Jusqu’au Traité des Pyrénées de 1659, le château subit à maintes reprises des incursions espagnoles. Mal défendu et peu entretenu dès la fin du XVIIème siècle, il est définitivement abandonné à la Révolution.
Puilaurens offre tout le répertoire de l’architecture militaire du Moyen-âge. La porte principale s’ouvre sur le rempart sud ; assommoir, archères, carreaux et barbacanes sont là pour accueillir les assiégeants. L’espace intérieur du château se répartit en trois niveaux : la zone du donjon et des principaux vestiges d’habitation, la zone de la large cour délimitée par une muraille et un espace inférieur ouvrant sur une poterne (petite porte dérobée). Dans les parties résidentielles du château, on trouve la tour de la Dame Blanche, nommée ainsi en raison du bref passage de Blanche de Bourbon à Puilaurens. Blanche de Bourbon meurt en 1361, vraisemblablement assassinée sur l’ordre de Pierre le Cruel, son mari. La légende raconte que son fantôme hante encore les lieux.
Nous quittons la forteresse et nous engageons dans la forêt d’En Malo Bac Estable. A travers la cime des arbres, nous profitons de belles vues sur le château de Puilaurens. Nous pique-niquons depuis un magnifique belvédère dans le secteur de la Serre des Aiguilles. La lumière ne vient pas vraiment et le mauvais temps nous guette. Il faut partir et rejoindre Axat, charmante bourgade traversée par l’Aude.
Court transfert pour le gîte d’étape de Labau.
Puivert, le château des troubadours
Quel excellent gigot d’agneau nous avons pu manger hier soir. J’en salive encore ce matin lorsque nous partons à travers la forêt des trois fontaines. Merci à toi Patty pour ton accueil. Nous traversons le hameau de Taffine et arrivons au village de Joucou. On y voit les ruines d’une église abbatiale de style pré-carolingien qui date de 768. Encore un sacré plongeon dans le temps!
Après Joucou, nous longeons la rivière Rébenty qu’apprécie tout particulièrement la truite Fario. Le long du cours d’eau, on peut aussi y voir des orchidées. A l’approche du village de Belvis, les rouleaux de paille s’éparpillent dans les champs. Et dire qu’ailleurs en France les agriculteurs n’arrivent plus à en fournir pour leurs bêtes en cet été 2011. Ici le paysage est exceptionnellement vert pour la saison. Une bizzarerie météorologique une fois de plus.
Déjeuner campagnard dans un champ fraîchement coupé. L’après-midi, nous descendons sur le plateau de Puivert. En chemin, nous croisons un orvet que Manu n’hésite pas à prendre dans ses mains. Rien à craindre, il n’a de serpent que l’allure. C’est en réalité un lézard sans pattes.
Des champs de tournesol tapissent le plateau en jaune tandis qu’un planeur s’élance de l’aérodrome et survole le château de Puivert. Où nous sommes s’étendait autrefois le lac de Puivert. Celui-ci est aujourd’hui bien plus petit depuis 1289, date de sa mystérieuse disparition. Il semblerait selon les textes anciens que sa cure d’amaigrissement soit le résultat de l’inondation de la ville de Mirepoix à 30 km de là par une violente crue ; ce qui entraîna la rupture du barrage naturel qui retenait les eaux du lac de Puivert. Une explication se trouve au musée du Quercob. Celui-ci est lié au château de Puivert. On y trouve notamment une très belle collection d’instruments médiévaux réalisés par des luthiers contemporains selon les sculptures qui ornent la salle des musiciens du château de Puivert.
Classé Monument Historique depuis 1907, Puivert est un château à part dans les forteresses que nous découvrons cette semaine. Sa situation en fait un bien maigre château de défense. D’ailleurs, il fut pris en 1210 par l’armée de Thomas Pons de Bruyère, lieutenant de Simon de Montfort après seulement trois séjours de siège. Non, l’intérêt du château est ailleurs.
Construit à partir de 1170, le château actuel daterait du XIVème siècle. Thomas V de Bruyères, baron de Chalabre, et sa femme, Isabelle de Melun, font reconstruire le nouveau château, à l’est du Castèl vièlh dont les vestiges sont toujours visibles mais interdits à la visite. Depuis sa vente en 1996 à un privé, il a servi à de nombreux tournages de films (La Neuvième Porte, Le Peuple migrateur, La Passion Béatrice…) grâce à son donjon très bien conservé.
La pièce maîtresse du château se situe au quatrième étage du donjon. La salle des musiciens est ainsi appelée car huit sculptures en très bon état de musiciens avec leurs instruments sont représentées sur les culs de lampe de la pièce. Cette salle servait donc à recevoir et à festoyer. Troubadours y été conviés pour animer les réceptions comme ce fut le cas lorsque Aliénor d’Aquitaine s’y arrêta quelques jours.
C’est ici que Peire d’Auvergne rédigea sa satire littéraire dans laquelle il critique les treize trouvères présents : Peire Roger, Guiraud de Bornelh, Bernard de Ventadour, Guilhem de Ribes, Rimbaut d’Orange, Cossezen…
Sous les sculptures, on peut y voir de pâles copies des instruments d’époque : la cornemuse, la flûte, le tambourin, le rebec, le luth, la guiterne, l’orgue portatif, le psaltérion et la vièle. Rien à voir cependant avec la qualité des instruments du musée de Quercob. Contrairement aux autres châteaux, il y a deux tickets d’entrée pour le musée et le château. Dommage qu’ils n’arrivent à s’entendre et à collaborer plus efficacement. Ils ont entre leur main un patrimoine exceptionnel qui pourrait davantage être mis en valeur.
Montségur, le refuge cathare
Depuis le plateau de Sault, nous remontons le sentier cathare par le plateau de Languerail où nous nous arrêtons pour pique-niquer. Deux troupeaux de vache, Gascogne et Aubrac, paissent paisiblement à proximité. Quasiment aucune ne s’est assise malgré le ciel bien gris. Est-ce dire que la météo va aller en s’améliorant ?
Nous entrons dans la forêt domaniale de la Plaine-Comus et passons le col de la Garguante, le point culminant de notre semaine avec 1352 mètres. Contrairement aux arêtes des châteaux du Pays Cathares, il n’a rien d’impressionnant. Nous redescendons au gîte d’étape de Comus tenu par Anne avec beaucoup de passion. N’hésitez pas à lui poser vos questions sur l’ours, c’est une grande fan du plantigrade. Nous venons d’ailleurs d’apprendre que Balou, l’ours des Pyrénées qui fréquentait les environs, s’en est allé trouver une femelle dans le Val D’Aran. Agé de huit ans, il pourra maintenant défier les mâles dominants.
Après une bonne nuit, nous empruntons l’itinéraire commun au sentier cathare et au chemin des Bonshommes ; direction le château de Montségur.
La météo est revenu au beau fixe et la chaleur aussi. Les 775 mètres à monter jusqu’au pied du château se font à grosses gouttes de transpiration. Par endroit, le sentier en glaise est vraiment boueux, ce qui n’arrange rien.
Nous traversons le village de Montségur. Un musée gratuit comporte des objets médiévaux provenant du château. Encore une bonne montée bien raide pour atteindre l’entrée de la citadelle.
Perché sur son pog à 1207 mètres d’altitude, le château de Monségur – la montagne sûre – a été construit à partir de 1204. C’était un castrum, à la fois forteresse défensive et sanctuaire pour les cathares. En effet, pendant toute la durée de la croisade, cette citadelle servira d’asile et de lieu de pèlerinage pour les cathares et leurs sympathisants. Il est estimé que 500 hérétiques y vécurent dont le grand évêque cathare Guilhabert de Castres.
La Papauté ne supporte pas ce bastion cathare et ordonne en 1212 et 1213 à Simon IV de Montfort puis en 1241 à Raymond VII de Toulouse de mettre fin à cette synagogue de Satan. Sans succès. En mai 1243, 6000 croisés dirigés par Hugues des Arcis, sénéchal de Carcassonne, entame son siège au printemps. Pendant huit mois, les attaques par la face sud, au relief plus doux mais extrêmement bien protégée, seront un échec. L’hiver s’installant, les assaillants tentent une ultime attaque par la crête orientale réputée inexpugnable. Les croisés arrivent à monter un trébuchet, sans doute en pièces détachées. Après reconstitution, ils criblent l’enceinte du château. Avec l’aide de complices, l’armée s’empare de la barbacane qui constituait la principale défense de cette partie du château.
Le 1er mars 1244, Raymond de Péreille et Pierre-Roger de Mirepoix sont contraints de négocier la reddition de la place forte selon ces termes :
• la vie des soldats et des laïcs sera épargnée,
• les parfaits qui renient leur foi seront sauvés,
• une trêve de 15 jours est accordée pour les cathares qui veulent se préparer et recevoir les derniers sacrements.
200 hérétiques qui refusent de renier leur foi cathare sont brûlés vifs au pied du château. Le château fut légué à Guy de Lévis, le fidèle compagnon d’armes de Simon de Montfort avant d’être abandonné au XVIème siècle.
Il reste cependant un mystère que nul ne peut expliquer. Selon des témoignages de l’époque, deux hommes Pierre Bonnet, diacre de Toulouse et Mattieu, parfait cathare, auraient quitté le château pendant le siège emportant avec eux le trésor de Montségur. Certains pensent qu’ils ont filé vers Crémone en Italie où vivait une communauté d’hérétiques. Quel était ce trésor ? A t-il vraiment existé ? Pierre Bonnet n’était-il pas le trésor permettant aux cathares de perdurer secrètement dans la société actuelle ? Autant de questions dont la réponse n’est connue que des intéressés.
Informations pratiques – randonnée en pays Cathare
Avec qui partir ?
Cette randonnée a été réalisée avec La Balaguère, agence de voyages à pieds basée dans les Pyrénées. Un grand merci à Emmanuel Ployé, accompagnateur en montagne et ambassadeur du catharisme pour le département de l’Aude, pour avoir transmis sa passion de cette frange de l’Histoire.
Quand partir ?
Cet itinéraire est réalisable du printemps à l’automne. L’été, il y fait chaud ; préférez donc le printemps pour la floraison et l’automne pour ses couleurs chatoyantes.
Difficulté
Randonnée de difficulté moyenne. Le dénivelé n’excède pas 775 m à la montée par jour.
Les étapes de ma randonnée en pays Cathare
Les temps de marche ne comprennent pas les visites de châteaux.
J1 : Quéribus – Duilhac
D+ : 221 m
D- : 494 m
Temps de marche : 2h30 + visite du château de Quéribus
J2 : Duilhac – La Bastide
D+ : 715 m
D- : 660 m
Temps de marche : 6h00 + visite du château de Peyrepertuse
J3 : La Bastide – Aigues-Bonnes
D+ : 755 m
D- : 655 m
Temps de marche : 5h30
Aigues Bonnes – Labau
D+ : 550 m
D- : 820 m
Temps de marche : 5h00 + visite du château de Puylaurens
Labau – Puivert
D+ : 500 m
D- : 665 m
Temps de marche : 6h00 + visite du musée de Quercob
Plateau de Sault – Comus
D+ : 625 m
D- : 340 m
Temps de marche : 5h00 + visite du château de Puivert
Comus – Montségur
D+ : 775 m
D- : 890 m
Temps de marche : 4h30 + visite du château de Montségur
Bibliographie
- Les Citadelles du Vertige de Michel Roquebert
- Histoire des Cathares de Michel Roquebert
- Le vrai visage du catharisme, d’Anne Brenon
Cartographie
- Carte n° 9 au 1/50000ème « Montségur » Ed. Randonnées Pyrénéennes
- Carte n° 10 au 1/50000ème « Canigou » Ed. Randonnées Pyrénéennes
Fondateur d’I-Trekkings et des blogs I-Voyages et My Wildlife, j’apprécie le rythme lent de la marche et des activités outdoor non motorisés pour découvrir des territoires montagneux et désertiques, observer la faune sauvage et rencontrer les populations locales. Je marche aussi bien seul, qu’entre amis ou avec des agences françaises ou locales. J’accompagne également des voyages photo animaliers qui associent le plaisir d’être dans la nature et l’apprentissage ou le perfectionnement de la photographie animalière.