Adieu déesse, ce soir au pied de ta parure (Ama Dablam )
Les porteurs arrivent au CB espérant trouver une embauche, les charges se constituent, tout ce qui n’est pas transportable par les yaks – trop fragile ou qui doit rester avec nous – se retrouve sur le dos des six porteurs dont nous avons besoin. Cela constitue comme toujours des charges phénoménales, d’autant que certains choisissent la double charge (entre 40 et 60 kg) pour avoir la double journée de 500 à 1000 roupies (10€).
Aujourd’hui maman a 88 ans étonnant non ? 88 ans 8848m 2008 serait-ce le 8 mon chiffre fétiche et non le 7 comme je l’ai longtemps cru. Beau joujou ce téléphone satellite qui permet de garder le contact et de souhaiter un joyeux anniversaire à sa maman depuis Gorashep (5350m). Départ 9h40, arrivée au pas de charge à Lobutche à 14h pour le lunch.
Ah la première gorgée de bière ! Quel plaisir et pas si minuscule que ça.
L’expérience est une lanterne qui n’éclaire jamais que le chemin déjà parcouru…
Je le sais pourtant qu’à la descente ils ont tendance à rallonger la sauce, je l’ai compris pourtant qu’Ang Tsering est pressé de rentrer chez lui et bien je me suis encore fait avoir dans ses programmes exagérés. Nous nous sommes déjà battus pour un jour supplémentaire au C2 et au CB, mais là je me suis fait avoir, total 9h d’étape arrivée 18h30 et porteurs loin derrière. Ang Tsering est un bon sherpa d’altitude, mais c’est un sirdar par trop directif, il impose d’abord et demande l’avis après, avec les autres sirdars j’avais l’habitude d’être consulté avant toute prise de décision, cela évite ces situations scabreuses où les clients arrivent sur les genoux à l’étape sans leurs affaires restés sur les porteurs dans la nuit.
Les sherpas arrivent 1h30 plus tard avec les porteurs. Nima complètement ivre et plutôt gai et Ang Tsering ivre et en fureur défait les charges à coup de pied, s’installe en face de nous et commence allusions et griefs, il est très remonté et l’alcool aidant le ton monte. Il ne supporte pas que je me sois plaint auprès de Maïla de la trop grande longueur de l’étape et que nous n’ayons pas stoppé à Pheritche. J’avais bien envie de m’arrêter à Pheritche, mais les cooks ayant disparu, j’ai pensé que le staff désirait qu’on descende jusqu’à Pangbotche, donc incompréhension complète. Parti sur sa lancée agressive, Ang Tsering déballe ses griefs sur les guides Allibert et qu’il a beaucoup travaillé pour cet Everest, que son travail se termine au camp de base, etc… Dommage de gâcher la fête ainsi. Nima continue de boire et de payer des bières et la soirée se prolonge dans une fête dansante improvisée, commencée dans la gêne et tout le monde met du sien pour faire oublier la colère du sherpa alcoolisé.
- M : 237m – 200m/h
- D : 1530m – 390m/h
- Tps : 8h45
J54 Mardi 27.05.08 – Pangbotche (4000m) Namche Bazar (3500m)
Sur le plancher, les vaches rêvent…
A jeun, revenu à de meilleurs sentiments, Ang Tsering reste avec nous pour cette étape qui ressemble à une étape plus classique de trek.
Arrivés à Namche, nous allons chercher sur Internet des nouvelles du monde. De notre monde. J’y découvre les mails de mon aimée et messagère de cette aventure vécue chacun à notre manière, ses textes sont beaux et émouvants et les réponses sont souvent drôles et inattendues et c’est une autre part du bonheur de ce voyage dans l’inconnu, donner à rêver, à gamberger à ceux du plancher des vaches.
- M : 555m -260m/h
- D : 1000m – 470m/h
- Tps : 6h12
J55 Mercredi 28.05.08 – Namche (3500m) Lukla (2800m)
Temps très nuageux avec peu de précipitations. Les deux sherpas sont montés au C2. Ils doivent équiper le col sud demain. Quelle météo ? Après le dîner nous jouons au yatze avec AG qui a de longues années de pratique avec sa grand-mère ! L’ambiance monte très vite et attirés par les cris le cook et le kitchen rappliquent… Ce sont des passionnés de jeu et ils comprennent de suite la règle. Cela laisse augurer de beaux tournois en perspective à notre retour! Je réalise 4 yams dans la soirée ! Michelliiiiiine ! Que fais-tu ?…
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J56 Jeudi 29.05.08 – Lukla (2800m) Katmandou (1350m)
Gourmandise quand tu nous tiens…
Accueil d’Aschok à l’aéroport, puis installation au Shanker et autour d’un thé petit "debrieffing" de l’expédition.
Vers 10h, tenaillé par la faim, me voila échoué devant la pâtisserie du l’hôtel Shangri La après avoir subi un échec dans les jardins, car ils en sont encore au petit déjeuner, toute volonté finissant je m’offre un capuccino (bon comme là-bas) accompagné d’une frangipane, d’un pain au chocolat et d’un croissant… Faiblesse de retour d’expédition où l’on connaît vraiment la faim ! Avec les mangues qu’on achète dans la rue, ça constitue un excellent déjeuner. A propos de mangue, si quelqu’un peut m’expliquer comment on mange ce fruit proprement.
En début d’après-midi Mrs Hawley me rend visite pour consigner tous les détails de notre expédition, dates, horaires, etc. Reste du temps consacré à Internet, nettoyage de la boîte mail qui déborde et qui rame et début de réponses aux nombreux messages de sympathie.
J57 Vendredi 30.05.08 – KTM (1350m)
Les copains d’abord…
Tri des affaires qui doivent rester à Katmandou pour l’Ama Dablam de l’automne prochain, puis visite aux bureaux de Thamserku. A 9h il n’y a pas grand monde, mais Sonam est annoncé sur la route.
Il me reçoit dans son bureau de "manager director", j’aime bien Sonam, vieille amitié, nous nous portons une confiance mutuelle jamais démentie, il me se semble qu’il gère avec honnêteté son immense business.
Nous devisons en compères sur les potins de l’Himalaya tout en avançant sur le dossier Ama Dablam. Tout est compris, prévu, caisson, pharmacie, radios, camp de base confortable, etc. Et je trouve que le rapport prix/prestations est vraiment intéressant contrairement à une réputation qui court ici ou là. La réussite s’accompagne toujours de son concert de jalousies. On passe en revue le cas des "traîtres". Parajuli, un type à qui il faisait confiance et qui est parti monter son agence avec une partie de la clientèle. Je l’amuse bien en lui sortant Parajuli Juni (Allibert) même combat.
Jangbu aussi son poulain des 8000 qui a organisé seul le voyages des deux Suisses Alain et Tom Nikles. Voyage qui s’est mal terminé… Par la mort de Tom. Quand on veut sauter du nid et voler de ses propres ailes, il faut en avoir les moyens et à quoi bon se passer de tout service et prendre des risques pour gagner 4 sous de plus.
On parle aussi des sherpas de l’Everest et je découvre que mon impression n’est pas sans fondement. Ils gagnent 5000 $ sur les deux mois, la moitié de ce que je gagne + une prime pour s’équiper, ils sont les mieux payés des gens de terrain… Certains en dépensent une bonne partie au retour en boissons et en jeux. Est-ce une raison pour regarder les autres de haut (8848m) et se comporter en caste. Il ne faut pas généraliser, mais beaucoup ont perdu de la sympathie qui faisait leur charme. Dommage, mais il n’y a qu’un Everest. Cela n’entame pas notre bonne humeur et nous nous quittons dans le plaisir de nous revoir à l’automne.
Le soir nous dînons au Rhum Doodle avec Ang Tsering que nous invitons. Dans la partie est de Thamel. Restaurant où les summiters de l’Everest ont un plat gratuit… A l’automne quand j’aurai le certificat d’ascension… Ang Tsering, revenu à de meilleurs sentiments à mon égard, me propose même de se voir pour l’Ama Dablam et admet que c’est plus intéressant que l’Everest. Étonnant non ?
Guide de haute montagne, Vingt-cinq années d’itinérance dans les Alpes, l’Amérique du Sud et l’Himalaya en alpinisme, trekking, expéditions et l’émotion provoquée par la fréquentation de paysages hors du commun ont trouvé un débouché tout naturel à une passion tenace pour la photographie et le terrain d’aventure. Je me retrouve à la tête d’une collection de clichés et de récits de voyages conséquente que j’aimerais mieux partager…Daniel