- 24 jours – 400 km – +19.000/-19.000m
Nous reprenons la marche là où`je l’avais laissée il y a quelques jours, à l’entrée du massif des Piatra Craiului. Signifiant « Pierre du Prince » en Roumain, il se compose essentiellement d’une longue crête rocheuse magnifique, classé parc national.
La montée sur cette crête à 2000 mètres d’altitude, est longue et bien raide. Le soleil cogne fort et la région manque d’eau. Pour Célia, c’est un premier jour de marche bien difficile. Surtout que nos sacs à dos sont chargés, 14 et 18 kilogrammes. Nous sommes partis avec huit jours de nourriture.
Sur l’autre versant, la descente se fait dans les éboulis. Avec la fatigue et le poids du chargement qui la déséquilibre, Célia n’en peut plus. Heureusement, nous croisons deux Roumains en chemin. Il s’agit du gardien du refuge Gorafita Pietrei Craiului qui se trouve en contrebas et d’un ami qui l’accompagne. Ils nous donnent un peu d’eau et nous guident jusqu’au refuge où nous arrivons à la tombée de la nuit, bien fatigué. Un refuge simple, rustique et fort chaleureux.
Nous prenons la direction des Munţii Făgăraş par une petite crête en forêt. La forêt est explosée par les tempêtes. De nombreux arbres sont arrachés du sol. Entre les troncs à passer et les trous dans le sol, c’est un parcours du combattant que nous devons franchir… Nous finirons la journée en plantant la tente à l’intérieur d’une bergerie abandonnée. Cela nous permet de nous offrir un espace un peu plus grand, car depuis le début je bivouaque qu’avec une tente monoplace. Si Rémi avait la sienne, avec Célia, nous devons nous serrer…
Le lendemain, nous atteignons le massif des Munţii Făgăraş. Il est le plus grand et le plus haut massif de Roumanie culminant en haut du Moldoveanu à 2554 mètres d’altitude. Après celui des Tatras, à cheval entre la Slovaquie et la Pologne, il est le massif qui domine les Carpates. Nous voilà partis pour une semaine de marche sur les hauteurs de cette imposante montagne.
L’itinéraire est entièrement balisé. C’est un classique de Roumanie. Mais sa traversée demandant une semaine en autonomie, il n’y a pas foule sur les hauteurs. Tout le long du chemin, des petits abris de fortune sont également installés. Cela nous évitera au moins pour la semaine à venir d’avoir à nous serrer dans la tente.
La crête est gigantesque et le panorama grandiose à perte de vue. Il n’y a ni ville, ni village, ni route, ni lignes à haute tension qui viennent obstruer ce magnifique tableau. Les Făgăraş sont isolés de tout, cela est dû par leurs difficultés d’accès. Les montagnes sont hautes et abruptes. Seule la Transfăgăraș coupe le massif à mi-parcours de la traversée. Il s’agit d’une route qui passe dans le massif, à 2000 mètres d’altitude et que l’on peut voir entrer et sortir de la montagne depuis son aplomb.
Lorsque nous nous rapprochons du Virful Moldoveanu, les nuages commencent à envahir la crête. Nous nous retrouvons plongés dans un brouillard total. Nous faisons le choix de nous arrêter au petit abri situé un peu en amont. Mais celui-ci est complet… Je ne peux même pas y rentrer, il n’y a pas la place. Il peut accueillir une douzaine de personnes. Ce qui est un peu juste pour le seul abri se trouvant dans le secteur, au pied du plus haut sommet de Roumanie. Comme le coin est trop exposé au vent pour bivouaquer, nous n’avons d’autre choix que de continuer jusqu’au refuge à trois heures de marche de là.
Nous passons juste à côté du Virful Moldoveanu, qui n’est plus qu’à dix minutes. Mais encore une fois, comme pour chaque grand point culminant, je me retrouve avec un mur blanc en guise de panorama. Nous ne prenons du coup pas la peine d’y grimper. Surtout que la route jusqu’au refuge Podragu est encore longue et la météo est de plus en plus dégueulasse. Il est le seul véritable refuge gardé de la traversée, situé un peu en contrebas de la crête principale. Nous pouvons au moins prendre un repas chaud pour nous consoler de n’avoir pas pu nous rendre sur le sommet des Munţii Făgăraş.
Au fur et à mesure que nous nous éloignons du sommet, les nuages reprennent de l’altitude et les montagnes retrouvent toute leur splendeur. La traversée est encore loin d’être finie. Nous poursuivons d’abri en abri, croisant quelques randonneurs, bergers et chamois…
Nous arrivons ainsi au Virful Negoiu culminant à 2535 mètres d’altitude sous un ciel bleu remarquable. Il est le deuxième point culminant de Roumanie. Pour moi, il sera finalement le point culminant de ma Transcarpatie. Et pour une fois, je n’ai pas la tête dans le brouillard pour admirer le panorama.
Nous sommes finalement contents d’avoir le ciel bleu maintenant, plutôt qu’au Moldoveanu. Car il nous permet de traverser la partie la plus délicate du parcours aisément. Une succession de passages équipés de chaînes, ou de petites passages d’escalade, durant plus de quatre heures, qui par temps de pluie doivent être un cauchemar à passer.
Nous arrivons au bout du massif et atteignons le village de Turnu Roşu 1500 mètres plus bas, et bouclons finalement cette traversée en cinq jours seulement.
Après deux jours de repos et de tourisme, dans le plateau Transylvanien aux petites villes médiévales de Sibiu et Sighişoara, nous reprenons la route.
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Nous pénétrons dans le massif des Munţii Lotrului. Situé au cœur de la région la plus touristique de Roumanie, il est pourtant oublié des randonneurs. Les dénivelés sont bien moindres que précédemment. Nous sommes loin de la haute montagne et le balisage est très aléatoire sur certains passages. Mais le massif est calme, reposant, charmant, agréable à parcourir. Quant au gardien du refuge sommaire et authentique de Prejba, il fait partie de ces rencontres marquantes. Il reste là, seul avec ses chiens, toute l’année, été comme hiver. Et ce n’est pas les randonneurs qui le dérangent. Il n’a accueilli que quatre marcheurs durant le mois d’août !
Dans ces montagnes isolées, nous retrouvons des meutes de chiens peu dociles et qui n’ont pas l’habitude de rencontrer des randonneurs. Pour Célia, qui a la phobie des chiens, ce sont ses premières meutes. Elle apprend petit à petit la technique du lancer de pierre et finit, à la dernière bergerie, par réussir à en tenir deux à distance… Pendant que je m’occuperai des huit autres…
Pour la suite de l’itinéraire plusieurs solutions s’offrent à nous. Munţii Parâng, Munţii Vâlcan, Munţii Retezat… Avec chacune leur problématique : soit de temps, soit de ravitaillement, soit de cartes…
Au final, nous choisirons l’option des Munţii Retezat, qui est certainement le plus beau parc naturel de Roumanie. Mais afin de pouvoir les traverser avant la fin du séjour de Célia, je suis obligé de faire une entrave à ma marche… Nous effectuons une portion de 50 kilomètres en stop… C’est ainsi que nous arrivons à Vulcan, une petite ville au pied du massif.
Avec les Munţii Retezat, nous reprenons de l’altitude. Nous commençons par suivre une superbe crête verdoyante sur une partie du massif qui est peu fréquentée. Le lendemain, à peine avons-nous quitté notre bivouac, que le chemin disparait. Nous ne sommes pourtant pas perdus, mais il n’y a plus rien. Nous nous retrouvons à franchir des minis forêts très denses. Parfois, nous marchons sans même toucher terre, uniquement sur les branches des arbres.
Puis petit à petit, la verdure laisse sa place à la roche. Nous retrouvons les hauts sommets et l’itinéraire devient plus chaotique. Avec tous ces obstacles, nous n’avons pas réussi à atteindre notre objectif du jour. Nous descendons de la crête afin de rejoindre un lac en contrebas. Officiellement, sur ce versant nous sommes maintenant dans le parc naturel. Nous ne pouvons pas bivouaquer n’importe où… Mais nous n’avons guère le choix ce soir.
Lorsque nous arrivons dans le cœur du massif, nous découvrons toute la beauté du parc des Retezat. Il est le plus beau parc de Roumanie et un vrai joyau des Carpates. Si l’été, il déborde de randonneurs, en cette saison, mi-septembre, nous avons quasiment les montagnes pour nous. Le panorama est exceptionnel sur les sommets jumeaux, le Virful Peleaga et Virful Păpușa culminant à 2509 mètres d’altitude chacun. Ils sont aussi pour moi, mes troisièmes plus hauts sommets de cette aventure. Cela fait maintenant 100 jours que je marche et je viens de passer la barre symbolique des 100.000 mètres de dénivelés positifs !
Nous passons la nuit dans ce cadre exceptionnel, à l’aire de bivouac du lac de Bucura en compagnie de quelques marcheurs et de deux Salvamonts.
Nous finissons cette belle étape par un petit détour dans le massif des Munţii Retezatul Mic, littéralement, les petites Retezat. Une belle petite crête à l’image de son grand frère.
De retour dans la vallée, Célia doit maintenant reprendre la direction de la France. Nous revoilà séparer à nouveau, mais cette fois, pour une vingtaine de jours maximum… Voire moins, car j’ai l’intention d’accélérer le pas…
Quant à moi, je prends la direction des Munţii Mehedinti. Un autre massif bien paumé, dont je ne dispose que de très peu d’information. Arrivé sur les hauteurs, c’est une nouvelle fois la jungle. La forêt est dense, il n’y a pas de sentier. J’erre comme ça a été souvent le cas, sur la crête en suivant mon cap.
La nuit approchant, je dois quitter absolument cette forêt. Je perds de l’altitude afin d’essayer de gagner la vallée. C’est comme cela que je tombe pile sur le barrage du lac de Lui Lovan. Moi qui n’aime pas l’eau, il est évident que j’ai horreur des barrages. Ces murs gigantesques qui renferment des millions de litres d’eau me donnent le vertige… Pourtant, je n’ai guère le choix. Je pose ma tente sur le barrage lui-même, un petit coin de pique-nique barbecue y est aménagé. L’emplacement au bord de lac est idéal… J’essaie d’oublier que je suis perché sur un mur à 100 mètres de haut. Le lendemain, je poursuis dans la vallée de Cernei classée parc national. Elle est beaucoup plus sympa à découvrir par le fond finalement, que sur les hauteurs qui n’offrent aucune visibilité.
Il ne me reste maintenant plus qu’à traverser un long plateau et je pourrai gagner le Danube qui marque la frontière avec la Serbie. Arrivé au bout, je ne sais comment en descendre. Les routes font de grands détours alors que mon point de passage, le pont de la Porte de Fer est en contrebas, à environ cinq kilomètres à vol d’oiseau. Mais je suis bloqué…
C’est là que je croise un vieux monsieur qui m’indique un sentier qui se trouverait au fond d’un petit canyon juste devant moi. J’ai déjà fait une première tentative par-là, mais je me suis fait bloquer par la végétation. Je n’ai pas réussi à atteindre le fond. J’y retourne, et force le passage cette fois… Je me retrouve dans une pente raide, glissante, semée d’obstacles… J’ai l’impression de voir le générique de l’émission « Man vs Wild » lorsqu’il dégringole des pentes abruptes…
Au fond, je tombe effectivement sur la trace d’un vieux sentier. Mais ça doit faire des siècles qu’il n’est plus emprunté. Il y a des ronces partout ! Me voilà coincé dans ce canyon étroit, impossible de faire demi-tour. Je lutte pendant près de deux heures contre les épines acérées. A la sortie, mes jambes sont en sang, ça dégouline de partout. Mon beau bronzage de l’été s’en retrouve zébré. Je garderai comme souvenir de ce passage des cicatrices aux bras et aux jambes pendant près d’un an…
La rive du Danube atteinte, je me retrouve sur une grande route à forte circulation, qui n’est pas du tout faite pour marcher. Je n’ai pas choisi la meilleure option finalement.
Au poste de douane, un agent de sécurité vient m’interpeler. Je ne peux pas passer. Ce point de passage de la frontière n’est pas autorisé aux piétons… Je vais être obligé de faire du stop pour franchir le pont long d’un kilomètre.
Cela fait une semaine que je n’ai pas pris de douche, je pue, j’ai les jambes en sang et des mouches qui me tournent autour. J’ai de sérieux doutes sur le fait de trouver un automobiliste qui accepte de me prendre. Mais c’est oublier la gentillesse des Roumains. Je me retrouve rapidement à bord d’une voiture qui s’élance au-dessus du Danube.
Voici quelques années, je me suis échappé d’une vie qu’il faut souvent suivre au pas…
Aujourd’hui je déborde d’énergie que je dépense dans la marche afin de parcourir des milliers de kilomètres pour découvrir les merveilles de la nature. Mes terrains de jeux préférés étant les montagnes et les zones désertiques, là où poussent les cairns. Mais je suis ouvert à toute la planète.
Je n’ai ni l’âme d’un écrivain, ni d’un photographe, mais j’ai un grand plaisir à faire partager mes aventures par l’intermédiaire de mes sites afin d’offrir un peu d’évasion.
Simon Dubuis
Carnets d’aventures : www.dubuis.net