Traversée de la Margeride par le GR4

Traversée de la Margeride à pied par le GR4 en 5 jours de randonnée, l'une des plus belles régions de la Lozère. Récit, infos pratiques et trace GPS.


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Focus Rando :Traversée de la Margeride par le GR4
5 jours +1390 m/-1450 m 1
Randonnée Ligne Camping, Chambre d hôtes, Gite d étape, et Hôtel
Campagne, Forêt, et Montagne Avril, Mai, Juin, Septembre, Octobre, et Novembre

En Lozère, dans le Massif central, le GR 4 traverse des paysages d’une beauté apaisante et d’une rare tranquillité. Je les ai arpentés pendant cinq jours en remontant le haut plateau de la Margeride, une région montagneuse et sauvage, depuis Langogne jusqu’à Le Malzieu. Le granite, le genêt et le pin sylvestre y règnent en maîtres.

De grands pâturages d’un vert éclatant, piquetés de jaune par les buissons de genêt, parsemés de blocs de granite, presque blancs, et de haut pins sylvestres, d’un vert sombre : c’est la Margeride telle qu’elle s’est imprimée sur ma rétine. Le tableau se décline en d’infinies variations. Toujours différentes, sans jamais lasser. La Margeride est une région presque sauvage, un haut plateau s’étalant principalement dans le département de la Lozère. Son charme opère d’emblée.

La Margeride est une terre d’élevage. Les pâturages que je longe sont tous occupés. Même si je ne les vois pas tout de suite, les vaches -souvent des aubracs- me repèrent vite. Curieuses, elles s’approchent. Les distractions sont rares. Il n’y a jamais grand monde sur le GR 4. Dans la région non plus, du reste. Une image résume bien la situation : vous prenez toute la population du département de la Lozère et la mettez tout entière dans le stade de France, à Paris ; eh bien, il reste encore de la place…

Jour 1 : de Langogne à Bessettes

+ 214 m / – 59 m 14,1 km Camping Les Sous-Bois du Lac

Avant de se mettre en piste, un crochet par le marché de Langogne s’impose en ce samedi matin. S’étalant dans les rues en pente autour de la vieille église romane du XIIe s et sous la magnifique halle aux 14 piliers de pierre, il est sans aucun doute l’un des plus beaux de la région. Idéal pour garnir son sac à dos : les producteurs y proposent qui de succulents saucissons, qui des fromages ou des légumes. Voire même, dans un autre registre, poules et poulets. Vivants bien entendu… Je fais encore une escale à l’ancienne filature des Calquières. Installée dans un moulin à eau datant du XVe s, elle est l’une des plus anciennes de France. J’ai pu y voir fonctionner d’antiques machines datant de 1850.

Maintenant, c’est parti. La première marque du GR 4 pour sortir de Langogne se fait désirer, mais je finis par la trouver, juste derrière la halle du marché. A peine les dernières maisons de Langogne sont derrière moi, que j’aperçois déjà le lac de Naussac. Avant d’y parvenir, je longe un golf pendant un bout de temps. Arrivé à la rive, je ne peux m’empêcher de m’y attarder. N’était la digue, loin là-bas de l’autre côté, je jurerais que le lac de Naussac -plutôt grand avec son millier d’ha- est naturel. Et pourtant. En fait, il l’était dans un lointain passé, presque avec la même étendue. Voici sans doute pourquoi je le trouve franchement agréable.

Un peu plus loin, je tombe sur la petite cascade du Donozeau : pas vraiment spectaculaire, mais franchement mimi,au creux de son anse. La rivière se jette ici dans le lac. Cet endroit me fait d’ailleurs beaucoup penser au Canada. Retour en Lozère : dans une trouée entre les pins, un peu plus loin, se dresse un curieux amas de gros rochers en granite blanc. Ils sont hauts, si joliment disposés et arrondis que cela en paraît surnaturel. Tout juste si je ne m’attends pas à voir apparaître un druide ou un farfadet !

Jour 2, de Bessettes à Grandrieu

+ 459 m / – 364 m 19,6 km Gîte des Deux Rieu

Une petite bruine m’accompagne en ce début de journée. Pas bien méchante. Les choses se corsent un peu lorsque le GR 4 quitte les larges chemins de terre pour emprunter d’étroites sentes. Elles n’ont pas été fauchées, les herbes sont hautes et… bien mouillées. Comme d’hab, ce n’est qu’une fois les pieds trempés que je me décide à enfin enfiler mes guêtres. Pas grave : je me sèche dans la sympathique boulangerie du village d’Auroux. Devant un petit déj’ -c’est aussi un salon de thé- j’apprends que c’est une commune très étendue mais qui ne compte guère que 150 habitants à l’année. Et, sur son territoire se trouvent pas moins de deux châteaux et trois manoirs. Fichtre, il y a du beau monde ici !

Aujourd’hui, la rando prend un tour nettement bucolique. Les prés sont envahis par de belles fleurs colorées : pensées sauvages, narcisses des poètes ou simples boutons d’or, le tout est du meilleur effet. Dans les pâturages, je remarque de nombreux veaux au côté de leur mère. Déjà solidement campés sur leurs pattes, ils sont mignons comme tout, avec de grands yeux attendrissants.

J’aurai assez vite l’occasion d’en apprendre plus sur l’élevage. Dans le petit hameau de Bellelande, en fin de matinée, mon chemin croise par hasard celui d’un agriculteur. Auprès de qui je vérifie me trouver sur le GR 4. La conversation prend un tour très détendu à la faveur d’un quiproquo risible : une vache que je croyais morte… alors qu’elle se prélasse au soleil, étalée de tout son long dans l’herbe. L’éleveur en profite pour m’entraîner dans sa ferme, me faire visiter les lieux. Avec son épouse Karine, David Loubière gère une exploitation de 160 ha avec 65 vaches, à 1 200 m d’altitude. Tout est bio depuis 2016, la ferme est auto-suffisante, tant pour le fourrage que pour le grain. En fait, le couple d’agriculteurs aime beaucoup faire découvrir son métier. D’ailleurs, à la belle saison, il organise des visites à l’intention des touristes de passage.

Décidément, la journée est instructive : au village de Grandrieu, où j’arrive par un très joli pont de pierre flanqué d’une belle maison abondamment fleurie, j’apprends que la chambre d’hôtes où je loge comporte encore un très ancien moulin. Répertorié depuis 1787 mais laissé à l’abandon ces dernières décennies, il a été remis en état par son propriétaire actuel. Pas une mince affaire : il aura fallu pas moins de quatre années de travail ! Et il moud à nouveau de la farine sur les vieilles meules de pierre. Évidemment, je vais le visiter.

Jour 3, de Grandrieu à Ferluguet

+ 459 m / – 388 m 22,2 km Gîte communal de Sainte-Eulalie

En fait, presque tout le vieux village de Grandrieu est intéressant. A commencer par son église romane du XIIe, dotée de belles fresques. Je vais y jeter un coup d’œil avant de reprendre le GR 4. Dans le brouillard. Dommage, car cette portion promettait d’être particulièrement photogénique : je vais passer d’un côté à l’autre de la crête de la Margeride, cette magnifique partie de la Lozère que j’arpente maintenant depuis trois jours. J’aurais dû voir les sommets du Velay, le mont Mézenc qui est le plus haut sommet d’Ardèche, peut-être le mont Gerbier-de-Jonc, et, vers le nord, le plateau du Devès où est cultivée la célèbre lentille verte du Puy, les monts du Forez. Tant pis. En attendant, je me régale avec ces paysages typiques de la Margeride, dont je ne me lasse vraiment pas. Puis, avec les méandres de l’Ance, une petite rivière qui fait onduler ses méandres dans une fort jolie vallée.

Dans le village de Combes, je fais mon apprentissage de la Margeride profonde. Celle où on ferre les bœufs et les vaches parce qu’ils travaillaient dans les champs -le cheval était un luxe- dans un ferradon. Situé juste à côté du grand four à pain communal, c’est un édicule fait de quatre piliers de granite solidement ancrés dans le sol, pour soutenir le poids des animaux. Par la suite, j’en verrai encore dans d’autres villages. Le ferradon servait encore dans les années 1950. J’admire aussi une belle croix, en granite évidemment, qui date du Moyen Age. La plupart des maisons anciennes sont quant à elles surmontées de « pièges à loup ». Ce sont des lauzes percées en forme de croix. Lorsque le vent passe dans cette pierre, il produit un curieux sifflement. Destiné à ramener les paysans égarés dans le mauvais temps… et à chasser les mauvais esprits.

On monte en altitude, la bruyère commence à apparaître. Les clôtures des pâturages sont souvent faits de pieux… taillés dans le granite : il n’y a pas si longtemps, le barbelé était hors de portée des paysans. Près de la crête, se croisent le GR 4 et le GR 43 à plus de 1 400 m, et je passe sur l’autre versant. Là, comme souvent, le temps est bien meilleur. D’ailleurs, les pâturages sont envahis par les narcisses, de grandes fleurs bleues à l’arôme lourd et entêtant. Ici, on les ramasse -aujourd’hui encore, même si ce n’est plus dans les mêmes quantités- avec des peignes montés sur roues, pour les expédier dans les parfumeries de Grasse. La descente est ensuite tranquille.

Arrivé devant l’église du village de Sainte-Eulalie, je vois mon premier clocher « en peigne ». En fait, les cloches sont disposées au sommet d’un mur qui surmonte l’église, en éventail. Voilà qui donne tout de suite une autre allure.

Jour 4, de Sainte-Eulalie à Lajo

+ 144 m / – 163 m 9,5 km Gîte communal

La matinée est consacrée à la réserve de bisons de Sainte-Eulalie. Le GR 4 ne passe pas juste devant -pas encore, car une révision du tracé en ce sens est à l’étude- mais ce n’est pas tous les jours que je visite un tel endroit. De telles réserves se comptent sur les doigts d’une seule main en Europe. Ce n’est ni un zoo, ni un parc animalier, mais une véritable réserve.

Une trentaine de bisons européens, une espèce en voie de disparition jusque dans les années 1990, y vivent dans un enclos de 200 hectares. Je la visite à bord d’une grande calèche tractée par des chevaux, comme tout le monde. Non par flemme, mais tout simplement parce que les bisons, s’ils craignent l’homme, s’accommodent fort bien de la présence de ces autres herbivores que sont les chevaux. La balade est d’ailleurs sympa. Surtout, je suis impressionné par ces grosses bêtes, tout droit venues de la Préhistoire, qu’on approche d’assez près.

L’après-midi, le paysage change un peu, il y a un je ne sais quoi de nouveau. L’impression d’être plus bas, alors que l’altimètre indique tout de même encore plus de 1 200 m ! Peut-être est-ce dû à ces longs murs de pierre sèche qui clôturent les prés. Assez souvent, je vois encore des pieux de granite qui ferment les pâturages. Même en sachant que de ce côté de la crête de la Margeride, cette pierre est un peu plus facile à travailler, je me dis que ça a quand même représenté un sacré paquet de journées de travail ! Car il y en a des dizaines et des dizaines, de ces pieux.

Jour 5, de Lajo au Malzieu

+ 635 m / – 529 m 18,4 km chambre d’hôte « Le Pré de l’hiver »

Cette fois, ce n’est plus une impression : le GR 4 descend, doucement mais sûrement. Sur de petits chemins herbus, en courant de hameau en hameau. Par bribes, de ferme en ferme, je rattrape la civilisation même si je n’entends que les oiseaux. Le soleil est maintenant fermement installé. Les quelques bois que je traverse, des pins évidemment, ainsi que des hêtres ou des charmes au tronc couvert de lichens sont bien agréables. A l’entrée d’une forêt, je découvre une cabane sympa : ouverte à tous, dotée de chauffage (il y a du bois, et même du petit bois pour faire une bonne flambée), table, chaises, lecture… rien n’y manque. Avec un côté vitré, elle a été construite par des chasseurs, ainsi que l’annonce une affichette, à l’intention des randonneurs et de tous ceux qui cherchent un abri. Ce n’est pas mon cas, mais merci quand même !

Assez vite, j’arrive au Malzieu, une ancienne et grosse bastide médiévale. Ce petit bourg est construit sur les bords de la Truyère qui n’est encore qu’une rivière tranquille. Le Malzieu n’est pas bien important non plus, mais offre un charme fou. Sans même parler de l’histoire de la Bête du Gévaudan, rappelée au travers de deux statues. Cette bête-loup ou homme, on ne saura jamais- a tué une centaine de personnes entre 1765 et 1767. En tout cas, le mystère passionne toujours.

En ce tout début d’après-midi, Le Malzieu est encore plongé dans la torpeur d’un début d’été. Je prends un réel plaisir à arpenter les rues -toutes, sans exception, sont pavées- en levant le nez pour admirer de belles demeures à foison. Et, là le beffroi du XIVe, là une tour -il y en a plusieurs- du XVIe, les remparts, l’ancien couvent des Ursulines. Le Malzieu recèle de véritables richesses patrimoniales. C’est ici, dans ce bourg historique que je termine ma rando sur le GR 4 en Lozère. Un bel endroit pour emporter quelques belles images en plus de celles récoltées sur les sentiers !

Informations pratiques

Le GR4, qui va de Royan à Grasse, de l’Atlantique à la Méditerranée, est long de 1 466 km. Il traverse treize départements dont la Lozère.

Lozere Tourisme fournit tous les renseignements et toutes les adresses pour organiser son séjour dans le département, le moins peuplé de France.

Une nouvelle édition du Topoguide consacré au GR 4, édité par la Fédération française de randonnée pédestre et indisponible depuis longtemps, est en chantier. Elle est prévue au courant 2022. En attendant, on peut se procurer une version numérique de l’ancienne version auprès de Lozère Tourisme ou encore de l’office de tourisme de Grandrieu : ot.coeurmargeride@randon-margeride.fr

Bonnes adresses

A Langogne, il faut absolument goûter les burgers d’Eric Mialhe, dans sa boucherie-charcuterie. Boulanger de formation ainsi que boucher de père en fils depuis un siècle, il concocte des burgers entièrement fait maison -depuis le pain jusqu’à la viande- aussi savoureux qu’étonnants. Nourissants aussi : bravo si vous en venez à bout ! 16, av. Maréchal-Foch. Tel : 04 66 46 98 22.

Hôtel-restaurant Beauséjour, un établissement rénové voici peu (cependant il vaut mieux demander une chambre donnant sur l’arrière car la route est passante).

Restaurant le Boulodrome, une adresse savoureuse tenue depuis 20 ans par Daniel Gaillard. Ce fils de paysans sert des plats exclusivement faits maison, dans la tradition régionale très, très améliorée. Les cromesquis au ris de veau ou la tête de veau sont ses plats fétiches. 7 rue du Boulodrome à Langogne, tel. 04 66 69 06 49

Un peu à l’écart de Grandrieu, dans de très beaux bâtiments anciens, le restaurant Mazimbert met à l’honneur une cuisine du terroir élevée au rang de gastronomie. Fameux.

A Sainte-Eulalie, le restaurant de la réserve de bisons sert une cuisine simple mais du terroir, avec des produits du terroir.

Transfert de bagages avec la Malle Postale, une société fiable installée au Puy-en-Velay. Elle transporte vos bagages sur plus de 50 itinéraires d’un hébergement (gîte, camping ou hôtel mais pas depuis des hébergements non professionnels) à l’autre, ne vous laissant que le sac de journée. A partir de 8,50 € par jour et par bagage (5 % de réduction aux licenciés FFRP et aux titulaires d’un Rando Pass).

Photographies

Toutes les photos de l’article ont été réalisées par la photographe Mélissa Rey. Allez voir son travail sur son site internet, son Facebook et Instagram.

4 réflexions au sujet de “Traversée de la Margeride par le GR4”

  1. Franchement, j’en referai bien l’un ou l’autre tronçon, tellement ça m’a plu. Et en tout cas, c’est promis, je retournerai en Lozère. C’est une région très attachante !

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