2024 fut une année compliquée pour les activités nautiques sur la Loire. Après deux annulations en juin et juillet, la descente de la Loire en canoë proposée par Jean-François Souchard, photographe professionnel et passionné de canoë à la tête de la Canoë Company , était à nouveau programmée du 23 au 25 août. Les conditions de navigation étaient optimum. Restait à savoir ce que la météo allait nous réserver. Récit de mes 3 jours de vagabondage en canoë au fil de la Loire.
En début de semaine, un premier mail de l’organisateur nous prévenait que les prévisions n’étaient pas engageantes, un coup de vent pourrait bien compromettre l’itinérance de trois jours prévue. Deux jours plus tard, un second venait heureusement confirmer le départ et donnait rendez-vous aux participants à Rochecorbon, en Indre-et-Loire. « Le vent s’est calmé et la pluie de samedi également » précisait Jean-François. Nous pouvions enfin préparer nos bagages tout en prévoyant tout de même un vêtement de pluie au cas où…
Les conditions de navigation étaient idéales, permettant « de passer partout même dans des bras habituellement asséchés » se réjouissait Jean-François qui connaît bien cette portion de la Loire pour y naviguer régulièrement. Seul, entre amis et avec des groupes qu’il initie au « vagabondage » et au bivouac. Avec pour seul objectif de se laisser porter par le fleuve royal : « Nous partirons de Rochecorbon en amont de Tours pour arriver 3 jours plus tard là où la Loire nous emmènera… » En respectant le rythme et les envies du groupe. En prenant le temps d’observer la faune et la flore, de faire la sieste sur une île, de se baigner après le déjeuner, de partir à la rencontre du castor… Nous étions partis pour trois jours en canoë sur la Loire, hors du temps.
Jour 1 : Rochecorbon – Luynes
Il était 9h30 lorsque nous nous sommes retrouvés à Rochecorbon. Jean-François et son complice Jean-Baptiste Coviaux étaient déjà arrivés ; ils avaient déjà descendu les 6 canoës de la remorque et le matériel nécessaire était étalé sur le sol. L’eau dans des jerricans, la nourriture dans les grandes glacières, la vaisselle, les barbecues, les gilets de sauvetage, les pagaies, le matériel de camping dans des grands sacs étanches… Nos deux guides avaient tout prévu ! Y compris des bidons étanches pour que chacun de nous puisse mettre ses affaires personnelles au sec. Des affaires de toilette, un ou deux maillots de bain car celui-ci n’a pas trop le temps de sécher la nuit, un vêtement chaud pour le soir et la nuit, un ou deux tee-shirts et un short de rechange, une casquette, des lunettes et une crème solaire pour se protéger du soleil, des chaussures qui ne craignent pas l’eau ; il n’y a pas besoin de plus. Il faut aussi prévoir un matelas et un sac de couchage, mais si vous n’en avez pas, on peut vous en prêter.
Après une brève présentation (nous aurons le temps de faire connaissance plus tard), il était temps d’embarquer. Par deux. Après avoir réparti le matériel et les vivres entre les six canoës. Et c’est sous un léger crachin que nous avons donné nos premiers coups de pagaie. Découvrant pour la plupart d’entre nous cette activité. Il a fallu apprendre à tenir sa pagaie, à se coordonner, à communiquer pour atteindre une navigation fluide permettant de relâcher son attention sur le geste et de découvrir l’environnement après quelques centaines de mètres. Elle était là, la Loire ! Majestueuse. Elle nous ouvrait ses bras. L’aventure avait commencé.
Rochecorbon se situe en amont de Tours ; là où nous avons rencontré la première difficulté : le passage sous le pont Wilson. Afin de ne nous faire prendre aucun risque, nos deux guides sont partis en reconnaissance pendant que nous restions en amont du pont. Sécuriser l’aventure est, en effet, pour Jean-François une priorité. Les passages sous les ponts sont parfois délicats. Rochers, pieux de bois et contre-courants peuvent entraver le passage, et selon le niveau du fleuve, on ne passe pas obligatoirement sous la même arche. Ce premier passage s’avérait plutôt sportif pour les néophytes que nous étions. « Si vous ne le sentez pas, nous passerons les canoës à votre place » proposait Jean-François pour rassurer les moins téméraires tout en expliquant la façon dont il fallait s’y prendre pour emprunter ce premier passage délicat.
Après 1h30 de navigation et tous les équipages ayant franchis le pont en canoë ou à pied, il était temps de trouver un espace propice au premier pique-nique. Le banc de sable après le pont fit l’affaire. Il offrait en plus la possibilité d’aller prendre un café à la guinguette avant de reprendre notre périple. Terrines en guise d’entrée, tomates à la croque-au-sel, jambon, beurre, pain, fromage, fruits, ce premier pique-nique fut aussi pour nous l’occasion de faire connaissance. Agnès était accompagnée de ses deux fils et sa nièce, âgés de 21 à 24 ans. Il y avait aussi Cécile et Richard. Et Sylvain qui allait partager le canoë avec moi durant les trois prochains jours. « Sauf si vous ne vous entendez pas ! On peut changer », rassurait Jean-François.
L’après-midi, nous nous laissions porter par le fleuve, découvrions les paysages, observions les aigrettes, hérons, martins-pêcheurs, balbuzards pêcheurs et autres cormorans qui volaient autour de nous. Jean-François nous guidait vers une hutte de castor et nous racontait comment ils avaient été réintroduits dans le bassin ligérien.
Après cette première journée riche en découvertes, il était temps de trouver un lieu pour installer le premier bivouac ; nous étions arrivés à hauteur de Luynes. « On n’a jamais bivouaqué deux fois au même endroit », confiait Jean-François en cherchant du regard un lieu propice : un banc de sable pour pouvoir accoster facilement, un espace suffisamment vaste pour installer le campement, des arbres afin de trouver du bois mort, le tout à l’abri du vent. C’est comme cela qu’il définit un « lieu de bivouac idéal ».
Hormis Agnès qui avait déjà participé à un vagabondage quelques années plus tôt, nous étions tous novices en la matière. Rapidement, Jean-François et Jean-Baptiste dont nous allions bientôt découvrir les talents ont organisé l’installation du campement et réparti les tâches entre nous. Il fallait rassembler du bois mort pour faire du feu, monter les tentes et les tarps, gonfler les matelas, puis préparer le repas… Après le pique-nique du midi, nous avons découvert que nos guides avaient prévu de nous concocter de vrais repas. Et c’est là que Jean-Baptiste est entré en scène !
Un canoë retourné sur deux bidons, une planche à découper, des couteaux bien aiguisés, Jean-Baptiste avait pour quelques jours délaissé ses outils de menuisier pour l’une de ses autres passions : la cuisine ! Il était temps d’éplucher les oignons, les poivrons, les courgettes, les aubergines, de couper les tomates et de verser le tout dans les grandes poêles chaudes placées sur les barbecues. Ce soir au menu : grillades et ratatouille !
Avant de nous retrouver autour du feu pour partager un apéritif local parfumé au géranium et nos impressions de la journée, il était temps de faire un brin de toilette dans la Loire !
La journée avait été riche, nous n’avons pas veillé très tard ce premier soir.
Jour 2 : Luynes – Bréhémont
Le lendemain matin, les premières lumières de l’aube réveillèrent les plus matinaux. Sans bruit, ils se rapprochèrent de l’eau pour profiter de ces instants magiques.
quelques mètres, Jean-François allumait le feu, mettait l’eau à chauffer pour le thé et le café, sortait le pain, la brioche, le beurre, le miel et la confiture. Rapidement rejoint par Jean-Baptiste qui attrapait un cul de poule et les œufs pour préparer une omelette et réchauffait le reste de ratatouille et les quelques saucisses qui, malgré les premières réticences, disparurent rapidement des plats ; l’appétit vient en mangeant !Après avoir plié les tentes, rassemblé le matériel, enterré les braises, ramassé tous les déchets -y compris ceux que nous avions trouvés sur l’île-, il était temps de repartir pour cette seconde journée qui débutait sous un soleil radieux. Rien ne laissait présager de la suite.
La matinée s’écoulait au rythme de la Loire et des pagaies. Jean-François nous faisait découvrir son univers, observer les oiseaux, nous guidait vers des bras qui habituellement n’étaient pas accessibles. Avec Jean-Baptiste, ils s’étonnaient des modifications des paysages, de l’ensablement des certaines zones… Partageaient des anecdotes. La matinée fut douce et propice à la déconnexion.
12h15, l’heure de repérer un lieu pour partager la salade de lentilles préparée le matin même par Jean-Baptiste pendant que nous étions affairés à démonter nos tentes et rassembler nos affaires était arrivée. Un bon morceau de fromage, des fruits, un café préparé au feu de bois complétèrent le menu. Le repas fut suivi d’une sieste à l’ombre pour certains, d’une baignade dans la Loire pour d’autres.
Il était près de 14h30 lorsque nous embarquions de nouveau en direction du pont de Langeais.
l’horizon, les premiers nuages faisaient leur apparition. Et contre toute attente, quelques minutes plus tard, le vent se levait ralentissant notre progression. De gros nuages sombres avaient remplacé le bleu du ciel et les vagues troublaient le calme du fleuve. Le coup de vent annoncé se révélait finalement plus fort que prévu et nous devions revoir notre façon de progresser et longer les berges pour nous mettre à l’abri. Pour certains, cet épisode fit partie de l’aventure et fut vite oublié, pour les plus jeunes il fut plus éprouvant. « Je n’ai pas pris de plaisir cet après-midi » confiait Simon, fatigué, à l’arrivée. Il faut dire qu’il a fallu tirer fort sur les pagaies pour atteindre le port de Bréhémont vers 16 h et nous mettre à l’abri. Heureusement il n’est tombé que quelques gouttes ! Une grosse averse aurait certainement eu un autre effet.Pour les organisateurs, il était temps de réfléchir à la suite de l’aventure. Consulter la météo. Échanger avec le groupe. L’aventure aurait pu s’arrêter là, au bout du deuxième jour.
tout moment, le chauffeur pouvait venir nous récupérer si besoin. Mais les prévisions étaient confiantes, le vent devait tomber dans l’heure à suivre et le soleil revenir pour la dernière journée. Quelques gouttes pouvaient encore s’inviter dans la soirée, mais ça ne présentait aucun danger pour le bivouac. D’ailleurs, sur l’autre rive, un lieu propice semblait n’attendre que nous. Nous décidâmes collectivement de poursuivre l’aventure !Cette fois l’installation du campement fut plus rapide. Chacun savait ce qu’il avait à faire. En priorité, il fallait monter les tentes pour se mettre à l’abri en cas de pluie. Rassembler du bois pour le feu et préparer le repas. La mini-tempête fut vite oubliée et les nuages se dispersèrent dans la soirée, laissant place à un beau ciel étoilé. Au menu ce soir-là : un Gombo, plat traditionnel de Louisiane à base de légumes, de viande de poulet, de saucisse et de ventrèche ; relevé avec des épices cajun et servi avec du riz ! Je crois qu’aucun de nous n’avait imaginé aussi bien manger durant ces trois jours !
Une fois la cuisson du repas terminé, quelques kilogrammes de pommes de terre furent placés dans un grand faitout en prévision de la salade aux harengs que nous partagerions le lendemain midi. Nous profitions également du feu pour nous retrouver, partager nos impressions de la journée et faire un peu plus connaissance avant de rejoindre nos espaces nuit respectifs.
Jour 3 : Bréhémont – Montsoreau
Ce troisième matin, ceux qui se sont levés tôt ont pu admirer le lever de soleil à travers la brume. Un moment magique qui dévoilait la Loire et le joli village face à nous. C’est d’ailleurs ce moment que Jean-François choisit pour sortir son appareil photo et s’éloigner de quelques mètres des berges en canoë pour capturer de belles images. Il ne fut pas le seul. La plupart d’entre-nous mitraillèrent l’horizon à l’aide de nos téléphones portables pour immortaliser ce moment.
Nous prîmes ensuite le temps de déjeuner avant de rassembler une dernière fois le matériel. Les tentes étaient trempées par la rosée du matin ; nous les ferions sécher à midi. Pas question de perdre du temps pour profiter de la belle journée qui s’annonçait. Le soleil était revenu et selon la météo, aucun nuage n’allait la perturber.
De grands bancs de sable jalonnaient notre parcours. Il y avait aussi beaucoup d’oiseaux qui s’envolaient à notre approche. Nous nous arrêtâmes une dernière fois pour pique-niquer à hauteur de La Chapelle-sur-Loire.
l’ombre, car le soleil brûlait la peau. Les tentes furent étalées sur le banc de sable ; elles séchèrent en quelques minutes. Après ce dernier moment de partage, il était temps d’embarquer une dernière fois. Après avoir dépassé la centrale nucléaire de Chinon, nous mîmes le cap sur Candes-Saint-Martin et sa collégiale. L’Un des plus beaux villages de France apparu bientôt sur notre gauche. Quelques centaines de mètres plus loin, nous débarquions au pied du château de Montsoreau. L’aventure s’achevait là.Après trois jours de navigation au fil de l’eau, au rythme de la Loire. Après trois jours de déconnexion, de partage, de découverte, il était temps de charger les canoës et le matériel sur la remorque pour remonter par la route jusqu’à notre point de départ. Après une photo de groupe, nous nous séparions, non sans avoir remercié nos guides qui nous avaient offert un merveilleux vagabondage.
Infos pratiques – en canoë au fil de la Loire
Plusieurs vagabondages sont proposés chaque année par Canoë Company, les dates sont précisées ici en début d’année. Vous pouvez également contacter directement Jean-François pour réserver votre déconnexion.
Je suis journaliste à la Renaissance du Loir-et-Cher et je pratique la randonnée à pied et à vélo depuis une dizaine d’année. En 2024 j’ai pris un congé sabbatique de 8 mois qui m’a permis de profiter pleinement.
Je suis kayakiste eaux vives et mer et aussi randonneur. Ce bel article m’a donné envie d’organiser un week-end avec mon club et compagnie canoë. J’ai copié le lien de cet article et lancer un sondage au sein du club : j’ai déjà beaucoup de retours positifs
Bonsoir, merci de m’avoir lue ! Et d’avoir laissé ce commentaire. Ça fait vraiment plaisir.
Je vous souhaite de pouvoir vivre cette aventure et d’y prendre autant de plaisir que moi.
Laurence