Brèche de Roland – Rivière près de Bielsa

Brèche de Roland - Rivière près de Bielsa - Traversée des Pyrénées par la HRP

Focus Rando :Brèche de Roland – Rivière près de Bielsa

Brèche de Roland – Rivière près de Bielsa

+880m/-2450m

Longue journée! Notre tour des merveilles des Hautes-Pyrénées n’est pas terminé: il reste le Mont Perdu et sa face nord. Pour y arriver, nous avons pour projet d’emprunter le raccourci qui longe la muraille formée par la chaîne de 3000 qui dominent le Cirque de Gavarnie…
Les sacs sont à nouveau hyper légers (4 kg environ). Si on arrive à boucler cette longue étape, ce soir on rejoint le troisième et avant-dernier dépôt.

Le Mont Perdu et sa face nord.

Lever de soleil à la brèche, à l’entrée de la grotte, je savoure ce moment magique. Quelles aventures cette nouvelle journée va nous apporter? Magique, les duvets sont presque secs! Le temps est au beau, pas de variation significative de la pression pendant la nuit: on décide de faire comme prévu: direction le Pas des Isards.
Passer le Pas, longer la muraille, trouver une faiblesse à gauche dans les remparts qui nous permettra de progresser sur les gradins pour arriver directement à l’Etang glacé au pied de la dernière pente menant au sommet du Mont Perdu. Ca a l’air simple mais sans carte et avec seulement quelques souvenir de descriptions lues sur internet, faudra surement improviser !

Il fait un peu frisquet, on met polaires et blousons un moment. Les randonneurs qui bivouaquaient côté espagnol sont déjà partis, depuis un certain temps: on ne les voit pas sur l’itinéraire.
Le Pas est sécurisé par un cable donc pas de problème. Par contre la suite nous réserve quelques névés un peu techniques: on sort les piolets. On gère au mieux, parfois en faisant un peu de grimpette, parfois en passant entre le névé et la muraille à gauche. Je me régale, c’est excellent (avec les sacs qu’on a!).
On a quand même l’impression d’être peu de chose comparé aux géants que l’on frôle…
Au fait, je n’ai plus mal nulle part depuis hier !
D’après ce que je me rappelle du topo, à un moment il faut prendre à gauche, mais ça n’a pas l’air évident et puis des traces continuent à flanc, on décide de les suivre.

Toujours rien de vraiment concret à gauche, à part un couloir mais qui mène on ne sait pas trop où… Dans le doute on reste en bas. Apparaît un lapiaz plutôt étendu, parsemé de névés. Quelques cairns difficiles à suivre nous servent de repère. On fait très attention: les crevasses sont impressionnantes, faudrait pas marcher sur un névé qui en cache une!
Personne en vue, soit ils sont partis très tôt, soit on s’est trompé d’itinéraire… Soit les deux! Pas grave, on va dans la bonne direction, si on sort du lapiaz après ça n’a pas l’air sorcier, au loin on distingue déjà la voie normale d’ascension du Mont Perdu.

Ce coin n’a pas l’air très fréquenté, les traces sont rares et plutôt anciennes, on a l’impression d’être éloigné de tout. La plupart du temps on improvise l’itinéraire, ce qui renforce cette impression: "à gauche là, comme ça on évite les éboulis, puis ensuite…" On se consulte chaque fois qu’une nouvelle partie du terrain apparait pour décider par où passer.
Finalement on sort du lapiaz, on grimpe une petite barre rocheuse de 20 mètres et on débouche sur un plateau et peu après nous voici sur la voie normale et sa horde de pèlerins 😉 . 20 minutes plus tard nous voici à l’Etang Glacé, on a rejoint la voie normale (VN) à 2800m. C’est pas trop mal, mais la prochaine fois, il faudra le trouver l’itinéraire qui mène directement à l’étang depuis la brèche!
Au fait, nous sommes revenus sur une carte: la n°23.
Nous voici face au couloir du Mont Perdu, un panneau averti sérieusement les randonneurs de la difficulté de l’itinéraire.

J

e m’engage vers le couloir, Nico m’arrête:

– "Ca a l’air raide !"

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– "Oui mais ça le fait sans problème: on passe par les éboulis à droite…"
– "Pourquoi on passe pas par là-haut, c’est plus facile". Il désigne la crête nord-ouest à gauche. Des gens sont en train de la parcourir.
– "Euh non c’est plus dur par là, on est monté par là avec Steph il y a deux ans. Sûr qu’il vaut mieux passer par la VN"
La crête est un itinéraire de rêve, mais côtée PD pour contourner le Doigt du Mt Perdu il y a un névé assez pentu à passer qui surplombe le glacier et un peu de grimpe, je préfère éviter…pour aujourd’hui.
– "T’es sûr de ton coup là?"
– "Oui. Tu verras."
La montée n’est pas que physique: je trouve une astuce ! En fait plutôt que de galérer par les éboulis, il faut rejoindre dès que possible la caillasse qui borde le couloir à droite: on y monte presque comme sur un escalier. On double tout le monde ! Derrière certains nous suivent et dépassent leurs potes en rigolant. Quand ça se redresse trop, une petite traversée dans les éboulis pour terminer en galérant un peu quand même et nous voilà sur l’épaule.

Je montre à Nico la suite: la face nord, la vallée de Pineta. C’est beau.
Au sommet (3h depuis la brèche) c’est la foule, disons environ 70 personnes. Etrangement ça ne me dérange pas du tout. J’observe un moment, amusé. Le gars avec qui on a discuté la veille est arrivé juste avant nous avec ses compagnons. Je discute avec l’un d’eux qui me décrit un peu par où ils sont passés, "fallait prendre à gauche sous le Casque, c’est pas évident, sans notre copain on serait allés tout droit".

Ben c’est ce qu’on a fait ! Noté pour la prochaine fois.
A chaque sommet on regarde vers l’est, vers la mer. Mais toujours des montagnes et des vallées, jusqu’à perte de vue. Patience, patience… Qu’est-ce que c’est beau quand même !
Le brouhaha commence à nous gêner, on grignote, on boit et c’est reparti.
La descente en baton-ramasse dans les éboulis sera rapide et sportive, puis j’enchaîne par une longue glissade sur le névé qui me ramène au bord de l’étang. Nico préfère continuer par la caillasse.
Pendant qu’il arrive, j’observe comment monter au col du Cylindre d’où on basculera face nord pour ensuite descendre le glacier. Apparemment il y a deux petites barres rocheuses très rapprochées et une vire au milieu les longe sur toute la largeur. On y va, en fait c’est pas difficile (2-) et le rocher est excellent. Après la première barre on prend la vire à droite et au bout à gauche c’est encore plus facile.
Après le col, les éboulis sont raides et casse gueule, on a hâte de rejoindre la neige.
C’est grand et beau, de nombreuses crevasses sont apparentes au milieu du glacier. Heureusement qu’on n’a pas à traverser ça! Une cordée espagnole est en train de descendre lentement encordés avec casques, piolets et crampons. On se gêne pas pour descendre schuss en appui sur nos bâtons (ça vient Nico, ça vient !), la neige est idéale pour ça, on arrive même à faire des prises de carre pour descendre en traversée.

I

l y a deux passages pour franchir la barre rocheuse au bas du glacier. Je connais déjà celle qui est le plus à l’ouest, mais les traces sur le glacier se dirigent plutôt vers celle à l’est. Va pour celle-là, comme ça je connaîtrai les deux !
Quand on y arrive, y a du monde. 5 ou 6 personnes sont engagées. Un descend sur rappel et les autres désescaladent en longeant la corde (2). On profite de nos sacs légers pour passer plus à gauche, c’est pas beaucoup plus difficile (2 ou 3) mais gaffe aux chutes de pierres quand il y a du monde en dessous.
En fait le gars en rappel est l’avant dernier d’un groupe de 15 personnes qui poirottent en bas. Au moment où le dernier s’apprête à descendre, le groupe d’Espagnols arrive et demande s’ils peuvent utiliser la corde ! On quitte les lieux avant la fin du débat ! Le névé en bas du passage n’est pas évident, très raide, je sors le piolet mais pas Nico.
Je découvre le passage ouest: c’est un torrent ! Impossible de passer par là aujourd’hui.

On traverse ensuite le plateau du lac glacé (qui l’est effectivement d’ailleurs, malgrè la chaleur) après s’être disputé le meilleur chemin à prendre.

On se mouille une godasse chacun en traversant une rivière, une dernière vue sur le Mont Perdu et on s’engage dans l’interminable descente (-1300m).
Pas de vent, on a chaud et il y a du monde à doubler. Les genoux encaissent, j’ose pas imaginer avec un sac lourd… D’impressionnantes chutes d’eau parsèment les flancs du canyon et rendent la descente un peu moins monotone.
En bas on fait une bonne pause d’une heure près d’un pont. Etirements, réhydratation et farniente.

On nettoie nos godasse, on checke nos pieds qui vont devoir subir plusieurs kilomètres de bitume ce soir et demain.
Aucun problème particulier à ce niveau, en fait on est en pleine forme mais la faim commence à se faire sentir. Ca tombe bien, il y a une épicerie près d’un des campings de la vallée!
En fait après ces 13 jours de marche je commence à sentir que l’apport calorique quotidien (3000 kcal) est insuffisant vu les distances parcourues. Ce qui était prévisible.

Nous prenons la route et récupérons le dépôt après 6km. Intact. Je mets le sachet en baluchon (accroché au bout des bâtons posés sur l’épaule) le temps d’arriver au camping où j’ai prévu de dormir. Une fois arrivé, Nico me dit qu’il n’est pas d’accord, on discute et j’accepte d’essayer de trouver un coin près de la rivière plus bas, même si c’est écrit partout qu’il est interdit de camper. Je m’apprête à aller acheter à manger à l’épicerie, il ne veut rien acheter… Ben moi je veux! Pomme, nutella, une grosse miche de pain, mayonnaise, 5 tranches de jambon. Je n’hésite pas à prendre pour deux. S’il n’en veux vraiment pas, je finirai !
On reprend la route, mon baluchon doit faire deux fois le poids de mon sac… Une ampoule se forme, merde, je me suis réjouis trop tôt tout à l’heure. Heureusement elle n’est pas douloureuse.
Après avoir fait une tentative infructueuse pour s’approcher de la rivière, on trouve un coin super joli 4 km après les campings.

Seul souci, on est dans le lit de la rivière !!! Et un orage non loin tonne depuis deux heures…
J’espère qu’il n’y aura pas de crue: 50 cm suffiraient pour qu’on baigne. Je fais part de mes inquiétudes à Nico, il me répond que non il n’y aura pas de crue. Je plaisante: "Bon ok, je suis rassuré maintenant, un grand spécialiste a parlé! ". On rigole, avant de se coucher on regroupera quand même toutes nos affaires au cas où il faudrait déguerpir !
Mais avant, gavade ! Les photos seront sans commentaires!

Je connaissais les capacités de Nico en matière d’orgie, mais là avec la mayo il arrive à m’épater. Ah… que ça fait du bien, on se marre bien.
Une bonne toilette en piquant une tête dans la rivière et on remet ça: il faut maintenant attaquer la bouffe prévue pour le soir qu’on avait mise dans le dépôt! Saladière, compote de pomme et la pomme pour finir. On n’a pas le courage de se faire les plats lyo… Le calcul des calories consommées cette journée dépasse les 5000kcal ! New record.
Ah quelle bonne soirée on a passée après cette grande journée.
Rassasiés on se glisse dans nos sacs qu’on a fini de faire sécher ce soir.

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