Carnet d’un trekking de 7 jours menant au Camp de base de l’Annapurna au cœur du sanctuaire des Annapurnas, véritables chapelets de sommets enneigés de 6000 à 8091 mètres. Des montagnes aussi évocatrices que le Machhapuchhare (6983 m), l’Annapurna sud (7219 m), le Gangapurna (7455 m) ou l’Annapurna I (8091 m). Parti de Phedi (1100 m), le chemin traverse des villages Gurung, peuple descendu du Tibet dans un lointain passé, encerclés de culture en terrasse, rejoint la Modi Khola et la remonte jusqu’à sa source dans le sanctuaire des Annapurnas. Là se dévoile un formidable panorama glaciaire…
Les Annapurnas sont situés à environ 210 km à l’ouest de Kathmandu. Le massif des Annapurnas est composé d'une dizaine de sommets culminant à plus de 6000 mètres, dont le plus haut est l'Annapurna I (8091 m).
Après villages et rizières, au sortir de la forêt, la vallée s'élargit tout à coup pour pénétrer au cœur du Sanctuaire des Annapurnas. Depuis le Camp de Base Sud de l'Annapurna, le panorama à 360° offre une vue magnifique. Tout autour dans cet énorme amphithéâtre naturel, les crêtes dépassant 6 000 m relient des sommets culminant à plus de 7 000 m : Hiun chuli (6 440 m), Annapurna Sud (7 220 m), Fang (7 650 m), Annapurna I (8 091 m), Annapurna III (7 555 m), Machhapuchhare (6 983 m) etc. Le spectacle des sommets et de leurs glaciers laisse sans voix.
J’ai réalisé ce trek sur le Sanctuaire des Annapurnas en individuel en 7 jours en 2007. L'article a depuis été mis à jour.
Place au récit, écrit sur place, day after day…
J1 : Phedi – Tolka
+ 1267 m / – 614 m 14,9 km Lodge27/10. 7h00. J’hèle un taxi à la sortie de mon hôtel. Direction la station de bus pour Phedi sur la route de Baglung. Il fait mine de ne pas comprendre et propose de m’y emmener pour 600 Rs. Au bout de 5 minutes, il finit par lâcher le morceau et me conduit où je lui ai demandé. Un car est sur le point de partir. Je paie rapidement et monte dans le bus. Une fois installé sur la dernière place assise, je me rends compte que j’ai oublié mon porte-carte dans le taxi. Trop tard, le bus roule déjà. Il me manque donc une carte, une boussole, un stylo et mon carnet de voyage. Par chance, j’ai une autre carte dans le sac à dos, moins précises certes, mais elle fera l’affaire.
Un gars d’Hong-Kong descend avec moi. Nous ferons un bout de chemin ensemble. Les premiers lacets sont horribles. 200 mètres plus haut, on est tous les deux essoufflé. On est monté trop vite. D’autant que je traîne un début de bronchite et une espèce de gastroentérite. Fièvre et nausées seront mon lot quotidien jusqu’à l’Annapurna Base Camp (ABC).
Je jure déjà à propos de mon sac à dos, trop lourd à mon goût (environ 14 kg). Sans compter mes 5,9 kg de matériels photos. Vous avez dit maso ? Que la journée va être longue…
Après cette première montée, le chemin s’aplanit aux premières maisons. Hommes et femmes récoltent le millet, principalement de l’ethnie Gurung, principal peuple de la région des Annapurnas. Ceux sont essentiellement des agriculteurs et des éleveurs de moutons. Depuis longtemps, les Gurungs forment le gros des troupes Ghurkas employées par l’Inde et la Grande-Bretagne.
Des enfants bloquent le passage sur le chemin en formant une chaîne et réclament une taxe. Des futurs maoïstes ?
Une autre montée un peu raide et nous sommes au cœur de Damphus. Le Machhapuchhare (6983 m), littéralement la queue de poisson, est censé se montrer à nous. On le devine à peine derrière une épaisse couche de nuages.
Damphus (1600 m), repère des voleurs, selon le Lonely Planet, possède encore son check-point Maoïste. Celui-ci a tout bonnement remplacé celui de l’Annapurna Conservation Area Project (ACAP). On nous demande de payer une taxe révolutionnaire. Après le printemps 2006 et le vent de démocratie qui a soufflé au Népal, les maoïstes avaient abandonné cette pratique à l'automne 2006. Mais voilà, le parti Maoïste a décidé le 18 septembre 2007 de se retirer du gouvernement dans l’attente des élections. Et les anciennes pratiques sont revenues aussi vite. Dommage car elles écornent l’image du pays.
Les tarifs ont quand même baissé par rapport à mon précédent passage en 2005. Après négociation, je m’en tire à payer 300 Rs au lieu des 700 demandés.
On continue à grimper à travers une belle forêt de rhododendrons, puis c’est le yoyo, un coup je monte, un cou je descends, jusqu’à Pothana (1900 m). Arrêt « Mixed fried rice ». Si le temps était couvert, c’est maintenant une vraie purée. On ne voir pas à 30 mètres. Alors les sommets de l’Annapurna : Nada !
Je rejoins Yung à la sortie du village. Le chemin, glissant par endroit, monte à travers une forêt dense, parsemée de clairières. Il atteint Deureli à 2100 mètres. Très bon contact avec la tenancière du premier gîte. Mais, je préfère marcher encore un peu…
Nous entamons la descente vers la Modi Khola. A Bichok, composé de quelques habitations éparses, nous croisons deux anglais et leur drôle de cargaison. Deux porteurs trimbalent sur le dos deux kayaks. Demain, les joyeux lurons rejoindront les méandres de la Modi Khola, importante rivière née des glaciers du massif des Annapurnas, pour se jeter dans les rapides et descendre jusqu’à Nayapul. Vu le débit, j’espère qu’ils en ont dans les bras…
Après avoir traversé un pont suspendu un peu instable, le sentier part sur la droite en montant légèrement. Nous posons notre barda au 1er lodge de Tolka, le sunlight Tourist Guesthouse and Restaurant. Ce soir, je partage chambre, repas et lodge avec Yung. Mais ça s’arrête là ! A 19h30, au lit. Sans rire !
J2 : Tolka – Chomrong
+ 1100 m / – 661 m 11,1 km Lodge6h00. Je suis réveillé par le chant du coq mais ne sort que trente minutes plus tard du sac de couchage. Dehors, c’est encore couvert. La barbe ! Je fais mon sac sans me précipiter et sors à 7h00 pour le petit-déjeuner. Entre temps, le ciel s’est dégagé comme par miracle. L’Annapurna sud (7219 m) et le Hiun Chuli (6441 m) se laissent regarder avec délice, une tasse de chocolat dans la main droite. Le petit-déjeuner est gargantuesque et mon appétit un peu moindre. Du coup, un chapati reste sur la table.
8h00. Je pars en compagnie de Yung. Le sentier descend dans le centre de Tolka. Une femme est assise sur le devant de chez elle ; elle est entrain de tisser tandis que son fiston, pieds nus, se mangent les mains. Nous enjambons un pont puis arrivons à Landruk, charmant village de caractère aux maisons de torchis et aux toits de chaume. Les villageois sont dans les champs ou écossent les lentilles. Elles finiront dans une assiette, très probablement suite à la commande d’un dal-bhat (riz lentilles), plat traditionnel népalais.
A la sortie du village, Yung prend la direction du Ghandruk et moi celle de Chomrong. Chacun continue sa route seul. Le chemin s’éloigne des habitations et descend jusqu’à la Modi Khola qu’il longe jusqu’à New Bridge, point le plus bas de la journée (1340 m). De la rivière, le point de vue sur l’Annapurna sud est vertigineux. Près de 7000 mètres de dénivelé. Je m’arrête 30 minutes pour me poser et boire un coca avant d’entamer la montée. Les premières pentes sont raides puis s’adoucissent pour rejoindre le village d’Udi. Courte et raide descente jusqu’à la rivière. Traversée du pont suivie d’une montée éprouvante jusqu’à Jhinudanda à 1650 mètres. Cramé, je pose mon sac et m’assoit à table. J’avale un fried rice et boit mon litre d’eau. Ici pas d’eau en bouteille à acheter mais de l’eau bouillie. Ainsi, le problème du recyclage du plastique ne se pose pas et les bactéries finissent au même endroit : à la morgue !
Je ne repars que deux heures plus tard. Le lieu invite à la paresse. Une source d’eau chaude se trouve à 30 minutes de marche d’ici mais j’ai abusé du temps et il me faut monter à Chomrong par une pente raide. Rapidement, je transpire à grosses goutes. Les marches n’en finissent pas. Le soleil tape fort. L’air est suffocant. Je souffle comme un asthmatique. Je dois m’arrêter pour récupérer. Un peu plus haut, j’ai les muscles des cuisses qui se tétanisent. Une nouvelle pause s’impose mais pas de Kit Kat en vue (la pause Kit kat ~ laissez tomber ce n’est pas grave). Je croise un trio de français. On discute trois minutes. Ça me donne du courage… pour deux lacets… puis à nouveau les douleurs. Je passe les premières habitations de Taulung et vomis. Je m’arrête quelques instants et finis la journée difficilement à Chomrong.
J’ai une saloperie dans le corps. Nausées, vomissements et fièvres me tapent sur le système. Je m’installe à l’excellent View Top Lodge and Restaurant. Pas de vue, c’est encoure bouché ! Quelques minutes plus tard, un belge investit la chambre. Il vadrouille depuis deux mois entre Tibet et Népal, à pied et à vélo et enfile des étapes impressionnantes. 15 jours pour faire le Tour des Annapurnas et le Sanctuaire des Annapurnas.
Chomrong, village Gurung, constitue les dernières véritables habitations. Plus haut, on ne trouve que des lodges tenus par des familles du village ou de Ghandruk. Lorsque l’hiver est trop rude, les gardiens redescendent vivre auprès de leur famille.
J3 : Chomrong – Himalaya Hotel
+ 1462 m / – 858 m 11,9 km LodgeJe quitte Chomrong à 7h45 par un escalier de pierre et traverse la Chomrong Khola par un petit pont de bois. Descente bien raide style casse-patte. La montée vers Sinuwa l’est tout autant. Malgré un délestage de quelques kg, mon sac semble toujours aussi lourd. Le sentier traverse un petit village environné de bambous et de rhododendrons. Je traverse le haut Sinuwa. La montée se déroule bien pour l’instant malgré ses hautes marches dont certaines atteignent 50 cm de haut. Mieux vaut ne pas les compter sous peine de tomber à la renverse.
Le sentier se poursuit à travers la forêt. J’entends du bruit sur ma droite et y vois à ma grande surprise une famille de langurs Hanuman. Ce singe tient son nom du dieu-singe Hanuman. Selon la mythologie hindoue, Hanuman accompagna le Dieu Rana au Sri-Lanka, pour y chercher Sita, la femme de ce dernier, enlevée par le démon Ravana, le roi du Sri-Lanka. Hanuman déroba un plant de manguier et le rapporta en Inde, où cet arbre ne poussait pas. Puni pour son forfait, il fut condamné au bûcher. En tentant d'échapper au brasier, sa face et ses pattes noircirent. La face et les pattes noires des Entelles témoignent toujours de ce châtiment. Leur statut d'animal sacré les préserve des persécutions des Hommes, bien qu'ils pillent souvent les cultures. Le jour de la fête d'Hanuman ils reçoivent des offrandes dans les temples hindous. Et si l'un d'entre eux meurt accidentellement (ils s'électrocutent souvent sur les câbles ou sont écrasés par les automobilistes), les fidèles lui font des funérailles hindoues en bonne et due forme.
Un peu plus loin, le Machhapuchhare se laisse admirer à travers la forêt. Ça sera la seule véritable fenêtre météo de la journée.
Le chemin passe par Kulhi, ancien centre d’élevage de moutons créé par les anglais. Les lieux seraient aujourd’hui occupés par l’ACAP, mais ça semblait plutôt abandonné à mon passage. Il s’ensuit un long escalier abrupt à descendre à travers une forêt de bambous et de rhododendrons, quelques lacets de plus et les lodges de Bamboo apparaissent. Cela fait 3h20 que je suis parti. Un petit coup de barre sur la fin. Bamboo arrive à point pour le repas. L’endroit est entouré de bambou, lequel est utilisé pour faire des nattes et des dokos (paniers des porteurs).
Mon épaule gauche me fait de plus en plus souffrir. J’ai une contraction consécutive aux frottements de la sangle de la sacoche de mon appareil photo. J’ai essayé différents positions mais rien n’y fait !
L’après-midi se poursuit sous un épais tapis forestier. J’atteints Doban en une heure et souhaite m’y arrêter pour la nuit. Le premier lodge m’annonce un tarif de 200 Rs. Le trouvant un peu cher, je vais voir les refuges suivant : tous complets ! Je retourne donc au premier. Le prix a subitement augmenté de 300 Rs. Puis, finalement, le lodge est plein. Le propriétaire m’annonce ça avec un large sourire narquois. On s’engueule puis finis par reprendre mon sac pour rejoindre l’Himalaya Hôtel à plus de 400 mètres de dénivelé de là.
Le sentier se rétrécit le long de la rivière par un chemin boueux et glissant. J’allonge le pas pour ne pas me retrouver sans lit. J’arrive fatigué au lodge. Douche froide (sans soleil, les panneaux solaires ne servent pas à grand chose). Parties d’échec avec la famille puis au lit…
J4 : Himalaya Hotel – Machhapuchhare Base Camp (MBC)
+ 984 m / – 133 m 5,6 km Lodge7h40. Je me penche en avant et vomis mon petit-déjeuner. J’ai connu meilleur entrée en matière. Moi qui hésité entre rejoindre le Machhapuchhare base Camp (MBC) ou l’Annapurna Base Camp (ABC), je viens de choisir.
Le sentier se faufile à travers de gros rochers. Entre deux arbres, on peut apercevoir quelques couloirs d’avalanche. Je râle. Je suis de mauvaises humeurs. Mes jambes tremblent mais je continue à avancer. J’atteints Hinku cave à 3000 mètres. La grotte serait utilisée comme hôtel. J’ai du mal à le croire. Ce passage marque la fin de la forêt. Quelques escaliers viennent meurtrir les muscles des jambes. Ah ses sacrés népalais. Si petits. Pourquoi faire des marches aussi hautes ?
1h10 plus tard, je suis à Deurali à 3200 mètres. Petite pause de 30 minutes, un thé, regard hagard. Au-delà du village, la vallée s’élargit et les premiers contreforts montagneux du sanctuaire des Annapurna sont visibles. Le chemin, moins raide, rejoint le bord de la Modi Khola, traverse plusieurs couloirs d’avalanche dévalant du Hiun Chuli (6441 m) et de l’Annapurna sud (7219 m). Le Machhapuchhare Base Camp est en vue. Encore une petite descente suivi d’un dernier escalier (pour la journée) pour atteindre le lodge.
Lorsque l’hiver s’est installé et que les ravitaillements n’ont pu passer les zones d’avalanche, le lodge est fermé. Si les risques sont moindres en octobre, il peut en être différent à la saison du printemps. Bien se renseigner à Chomrong.
Le MBC n’est plus utilisé par les alpinistes depuis que le Machhapuchhare (6983 m) a été interdit d’ascension. En 1957, une expédition britannique conduite par le légendaire colonel Jimmy Roberts – un pionnier en matière de tourisme au Népal – a tenté la première ascension légale des 6697 m du Machhapuchhare. Ce sommet au nom qui signifie en népalais «Queue de poisson» dessine peut-être l’un des reliefs les plus connus au monde. Formé de glaciers ancestraux, il apparaît depuis la plaine subtropicale de Pokhara comme le plus haut pic du massif de l’Annapurna, car il occupe le devant de la scène. A l’époque, le temps s’était tellement dégradé que les alpinistes britanniques avaient dû rebrousser chemin à un peu moins de 150 m du sommet! Par la suite, le gouvernement népalais n’a jamais accordé d’autres autorisations, car le Machhapuchhare est, pour l’ethnie locale, les Gurungs, le sanctuaire des Dieux.
A 11h00, heure à laquelle j’arrive, un voile nuageux recouvre la zone. Elle tiendra tête au ciel bleu jusqu’à la fin de la journée. Une fois de plus… On ne peut pas dire que la météo soit capricieuse depuis mon départ. Les nuages ont décidé d’élire domicile dans ce paysage des Dieux. La pluie ne s ‘est pas invitée, c’est déjà ça !
J5 : Machhapuchhare Base Camp (MBC) – Annapurna Base Camp (ABC)
+ 465 m / – 0 m 3,1 km Lodge6h15. Le soleil encore derrière le Machhapuchhare éclaire l’Annapurna Sud d’un ton vif. La nuit a été bonne malgré l’altitude. Je n’ai pas eu froid, pas chaud non plus. Pas de signe du mal des montagnes. La nausée est encore là cependant. Je ne l’attribue pas à l’altitude mais plus à mes soucis de santé depuis le début du trekking.
7h00. Je prends les cairns, doucement, pour ne pas m’exposer au souffle court. La pente est douce et le ciel d’un bleu limpide.
Droit devant, l’Annapurna sud indique le chemin. L’air est enfin sec. Pas de foret humide. Pas de transpiration inutile. Je me sens dans mon jardin, sans prétention aucune. Je laisse de coté la Modi Khola, petit ruban blanc coincé entre les montagnes, qui part prendre sa source au pied de l’Annapurna III avant de rejoindre la vallée de la Kali Kandaki.
Installé sur la moraine, l’ABC est composé de quelques lodges, d’un emplacement de bivouac et d’un terrain de volley. Je m’installe à l’un d’entre eux, pose mon sac et part l’appareil à la main. A cet instant précis, un hélicoptère se pose. Trois alpinistes ont dévissé dans l’ascension du Fang (7647 m). Rien de grave fort heureusement, mais ils ont préféré rebrousser chemin.
Je rejoins le chorten. Un porteur d’origine tibétaine murmure à répétition le « Om Mani Padme Hum » tout en touchant le chorten de sa main droite et en tournant son mala de l’autre main. Ce mantra bouddhiste de la compassion est l'un des plus connus et des plus utilisés de part le monde, et sa force ou charge énergétique est particulièrement grande. Sa signification est “Le Joyau dans le Lotus” et représente la conscience du Divin en chaque être humain.
Le sanctuaire des Annapurnas, cet incroyable belvédère, est une des plus belles vues de montagne qu’il m’est été donné de voir. Plus que cette série de sommets comprise entre 6000 et 8091 mètres, ce qui impressionne c’est la dimension du paysage et son ambiance haute montagne entre glacier et minéralité. La chute d’un sérac sur la face sud de l’Annapurna I déchire l’espace et ajoute une touche au gigantisme des lieux. L’Annapurna I, 10e sommet le plus haut du monde, est la première montagne de plus de 8 000 mètres à avoir été gravi en 1950 par l'expédition Maurice Herzog.
A 12h00, le brouillard venu de la vallée envahit le sanctuaire. Plus aucun sommet n’est visible. C’est donc l’heure d’aller manger !
Comme par miracle, l’horizon se dégage en fin d’après-midi. Tous les trekkeurs sortent des lodges où ils étaient réfugiés pour assister au coucher de soleil sur le sanctuaire et le Machhapuchhare en particulier. Les derniers rayons sur le Queue de Poisson vont du rouge au mauve en passant par le rose. Au gré du vent, un halo de nuages effiloché entoure le pinacle. De toute beauté !
Chacun retourne dans son lodge avec le sentiment d’avoir vécu un grand moment au milieu de ce cercle glaciaire unique au monde.
J6 : Annapurna Base Camp (ABC) – Chomrong
+ 949 m / – 2845 m 20,7 km Lodge5h45. Comme hier soir, tout le monde s’extraie de son duvet pour admirer les magnificences du soleil sur les montagnes de l’Annapurna. Comme chaque matin, ceux sont surtout l’Annapurna sud et l’Annapurna I qui sont à la fête.
7h30. J’entame la descente vers où mes pieds me porteront. C’est l’inconnu. Je ne préfère pas me donner d’objectifs de marche pour la journée. Le chemin est à l’identique celui emprunté à la montée, le soleil en plus.
Je passe MBC, me pose 15 minutes à Deurali pour boire un thé, puis traverse Himalaya Hotel. A Doban, je prends des œufs et des frites. Pas très local, j’en conviens mais vue que la forme a l’air d’être au rendez-vous, je préfère manger un plat bien de chez nous.
Faire le chemin en sens inverse permet de se souvenir de moments passés à la montée : un sourire échangé entre deux randonneurs en plein effort, un Namasté avec un népalais, une discussion avec un Gurung… Autant de petits instants qui marquent un trek.
A Bamboo, je prends la décision de continuer. J’y croise un italien et un anglais rencontré à l’ABC qui déjeunent. Eux aussi souhaitent aller plus loin. Il s’ensuit une longue montée que j’avais oubliée à l’aller. Je plonge vers Sinuwa et prends la décision de rejoindre Chomrong. J’aurai ainsi rattrapé ma journée de retard pris à la montée. Je rejoins la Chomrong Khola et entame l’ultime ascension de la journée. Je passe les marches, les unes après les autres pour retrouver l’excellent View Top Lodge and Restaurant.
Près de 2500 mètres de dénivelé négatif dans la journée. J ‘arrive fatigué mais je n’ai pas le sentiment d’avoir trop entamé mes réserves comme lors de la montée. J’ai l’impression aussi que ma sinusite m’a joué des tours en altitude. A une hauteur plus raisonnable, je me sens mieux. Nous verrons bien demain…
J7 : Chomrong – Nayapul
+ 503 m / – 1674 m 18,3 km Lodge7h30, Chomrong. Sous la pluie. Je suis rêveur ce matin et je rate l’intersection pour le col de Konrong. Je continue. Je prendrai un autre chemin. Une heure plus tard, je passe la Kimong Kholagaon. Après les lodges de Newbridge, je prends un sentier secondaire qui part sur la droite.
Pas de vue particulière mais une grande quiétude. Le long de la Modi Khola, je ne croiserai aucun trekkeur et à peine quelques porteurs. Sous Ghandruk, le sentier rejoint le chemin qui relit cette grande cité Gurung à Landruk, village de la rive est de la rivière. Je m’infiltre entre deux groupes pour une montée tout en marche d’escaliers à travers les champs de millet et de blé.
Sous le gros bourg, un sentier en pavé descend ensuite en pente douce et passe Chane. A Kimche, où je déjeune, les villageois s’attèlent à la récolte du blé. Une fois fauchée, celui-ci est mis en paquet puis entassé méticuleusement sur un tas en formation. Je retrouve avec plaisir ces scènes de vie villageoises qu’il n’y a pas au dessus de Chomrong.
Deux enfants viennent à ma rencontre. Ils n’ont rien à quémander, rien à vendre. Ils sont là par curiosité et partage volontiers sourires et grimages. Je leur rends bien parce qu’ils le valent bien !
Plus bas, je croise plusieurs convois de mules. De ce côté ci de la Modi Khola, la pente, moins raide, permet l’utilisation d’animaux de bâts pour le transport des marchandises. N’ayant pas d’indications précises sur le temps de marche, je demande aux villageois que je croise sur mon passage. A chaque fois, on m’apporte des estimations différentes. Si bien que je ne saurais jamais réellement.
15h00. Les fonctionnaires de Birethanti me demandent mon permis d’entrée dans l’Aire de Conservation de l’Annapurna. Je leur explique que je ne l’ai pas car le bureau de l’ACAP de Pokhara était fermé lors de mon passage vendredi dernier en fin d’après-midi. On me demande 2000 Rs de plus que les 2000 exigés à Pokhara. Je refuse de payer pour une situation qui n’est pas de mon fait. Je reste jusqu’à 17h00 à négocier en tentant toutes les techniques de négociations : le mec sympa, moins sympa, la séduction, etc. Mais, un des fonctionnaires ne veut pas lâcher l’affaire. « La loi, c’est la loi » me dit-il ! J’ai bien envie de l’embrocher sur le mur mais je m’abstiens.
18h00. La négociation n’a pas avancé. Le bureau de l’ACAP ferme ses portes et deux policiers m’emmènent au poste de Birethanti. On me fait asseoir dans une pièce sombre de 10m² comprenant un petit bureau et une armoire vide. Le responsable de la Police écoute les différentes versions et essaie de nous persuader l’un, puis l’autre de résoudre le conflit. Il ne semble pas comprendre pourquoi je ne pais pas : « Qu’est ce que 2000 Rs pour un européen ? » Une heure plus tard, des dizaines d’hommes et de femmes traînent devant le commissariat pour voir ce français pris dans les griffes de la Police. Un policier qui arrive demande :
« C’est un israélien ? »
« Non, même pas, il est français ! »
Une femme passe la tête à travers la fenêtre de la pièce et me demande si je suis bon à marier. Elle insiste. Je la regarde mais ne sourie pas. Elle paraît sincère. Je suis stupéfait !
On me passe au téléphone la responsable de l’ACAP à Pokhara. On me laisse deux alternatives :
– Payer 4000 Rs et continuer ma route
– Passer la nuit au poste avant d’être rapatrié à la prison de Pokhara
Info ou intox, je ne sais plus… J’ai failli être tenté d’aller plus loin dans ma démarche pour voir jusqu’où il pouvait aller. Mais, j’ai finalement cédé…
Le fonctionnaire de l’ACAP me conduit au bureau en trainant les pieds. Il n’a pas tort. Ce français qui l’a fait chier !
Lorsque je quitte Birethanti, la nuit est tombée. Je poursuis donc ma route à la frontale. Une petite demi-heure plus tard, je suis sur la route. Je hèle le premier véhicule. C’est un bus pour Pokhara. Une grosse heure plus tard, je m’installe à l’hôtel…
Une fin mouvementée… Un peu de repos à Pokhara me fera du bien avant d’attaquer le trek de Jomosom.
Informations pratiques
Mon avis sur le trek du sanctuaire des Annapurnas
Le Sanctuaire des Annapurnas permet d’accéder en peu de temps à l’univers de la haute montagne et d’avoir des vues spectaculaires ! Ceci sans pour autant devoir séjourner longtemps en haute altitude avec la fatigue et la rigueur climatique qu’elle entraîne. Revers de la médaille, le sentier est jalonné de trekkeurs. Impossible d’y être isolé !
Comment s'y rendre ?
Vol international jusqu'à Kathmandu. Des bus peuvent ensuite vous conduire jusqu'à Phedi.
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Partir seul ou guidé ?
J'ai réalisé le trek du sanctuaire des Annapurnas en solo. Mais, depuis le 1er avril 2023, il est obligatoire pour tous les randonneurs étrangers de s'accompagner d'un guide ou d'un porteur agréé lors de leurs treks au Népal. Cette mesure a été instaurée par le gouvernement népalais pour renforcer la sécurité des trekkeurs, réduire les incidents en montagne et soutenir l'emploi local dans le secteur du tourisme.
Itinéraires
L’itinéraire débouche sur un cul-de-sac : le Sanctuaire des Annapurnas. Une partie du retour se déroule sur le même chemin. À partir de Chomrong, plusieurs variantes existent, apportant un brin de nouveautés aux paysages déjà rencontrés.
Durée
Les agences de trekking programment le sanctuaire des Annapurnas en 10 jours afin d’optimiser l’acclimatation à l’altitude. Si vous êtes acclimaté ou en forme, il est possible de réduire la durée du trek. J’ai croisé un belge qui l’a fait en 4 jours (un peu vite pour apprécier selon moi). Si vous êtes bon marcheur, 6 à 8 jours devraient être suffisants.
Période conseillée
Les mois les plus favorables sont ceux d’octobre, novembre et avril.
Sécurité
L’itinéraire du Sanctuaire des Annapurnas passe par de nombreux couloirs d’avalanche. Bien se renseigner à Chomrong avant de les traverser.
Hébergement & Restauration
Des lodges & des restaurants jalonnent tout l’itinéraire. Inutile de prendre une tente. Généralement, confort sommaire mais suffisant, douche solaire.
Ouvrages
- Carte au 1/50000e Annapurna Base Camp. Voici une autre référence.
- Annapurna : A Trekker's Guide : topoguide en anglais présentant 14 itinéraires de trek dans les Annapurnas dont le Tour des Annapurnas et le Sanctuaire des Annapurnas.
- Lonely Planet Népal
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